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Mécanismes d'intégration et d'exclusion sociale par le travail dans un environnement économique et social en mutation
Titre du projet
Mécanismes d'intégration et d'exclusion sociale par le travail dans un environnement économique et social en mutation
Description
PNR 51- Intégration et exclusion - Module « Emploi, travail salarié et protection sociale »
Résumé des principaux résultats (extrait du rapport final)
Le travail reste à ce jour un élément fondamental de l'intégration sociale des individus. En tant que "lien organique", il offre bien plus qu'un salaire pour vivre: un statut et une légitimité sociale. A ce titre, son absence involontaire est depuis longtemps reconnue comme l'un des principaux risques d'exclusion sociale, contribuant à l'appauvrissement tant monétaire que social des individus. De là à déduire que le fait d'avoir un emploi protège à lui seul de l'exclusion sociale, il n'y a qu'un pas, souvent franchi, en particulier dans les politiques d'insertion socio-professionnelle. Pourtant, le développement de formes d'emploi atypiques, souvent marquées par la précarité, ou de la pauvreté laborieuse (working poor) révèlent que les choses ne sont pas forcément aussi simples que cela. De fait, dans un contexte de mutations profondes du travail marquées non seulement par le développement d'une précarité de l'emploi (travail temporaire, licenciements, etc.) mais aussi par une précarité du travail (dégradation des conditions de travail dont participent une intensification du travail et une pression à l'extrême flexibilité et adaptabilité des travailleurs et travailleuses), certaines formes d'intégration professionnelle marquée par l'une et/ou l'autre de ces précarités apparaissent désormais contenir, elles aussi, un risque d'exclusion sociale.
Les analyses statistiques menées dans cette recherche confirment globalement ces tendances. La précarité professionnelle est ainsi très directement liée à différents indicateurs de pauvreté et de précarité financière (endettement, retards de paiement, déprivation en biens de consommation durable, bas revenus, etc.), de même qu'à des conditions moins favorables de logement (logement de moindre qualité, moins d'une pièce par personne, etc.). Dans un autre registre, cette précarité professionnelle va de pair avec une moindre participation sociale, tant en ce qui concerne le rapport aux institutions (confiance dans les institutions, participation politique) que les relations interpersonnelles (activités en public, contacts sociaux, soutien de la part des proches). Elle déploie également des effets négatifs sur la santé des individus concernés (état de santé auto-estimé, nombre de jours durant lesquels la personne est gênée dans ses activités habituelles du fait d'un problème de santé, divers problèmes également connus comme des symptômes de stress au travail tels que les problèmes de sommeil, les maux de dos ou de tête, etc.).
Dans tous les cas, la précarité du travail semble jouer, en Suisse, un rôle plus négatif que la précarité de l'emploi. Ainsi, les personnes faisant état d'une insatisfaction dans leur travail (indicateur utilisé pour mesurer la précarité du travail) ressortent comme les plus exposées aux risques d'exclusion sociale tels qu'étudiés dans cette recherche, qu'elles connaissent ou non en parallèle une insécurité de leur emploi. Les personnes qui ne connaissent "que" la précarité de l'emploi apparaissent moins exposées, mais se trouvent malgré tout régulièrement dans des situations moins favorables que celles qui ne connaissent aucune forme de précarité professionnelle.
Ces constats se retrouvent globalement quand on considère l'évolution des situations individuelles: la précarité professionnelle, lorsqu'elle perdure, augmente le risque d'une détérioration de la situation économique, des relations interpersonnelles et de divers aspects de la santé. Ceci se confirme même en tenant compte de l'influence de facteurs connus d'inégalités sociales (âge, formation, ou profession exercée) ou des effets croisés de divers aspects de l'intégration sociale (p.ex. effet de la pauvreté sur la santé). On peut donc affirmer que la précarité professionnelle est
bel et bien un élément moteur dans les processus qui mènent à l'exclusion sociale, même si bien sûr elle n'est pas seule en cause.
Cette recherche vise aussi à éclairer particulièrement les différences entre les sexes sur ce sujet. Celles-ci révèlent la complexité des phénomènes étudiés. Le lien entre précarité professionnelle et exclusion sociale se retrouve tant parmi les femmes que parmi les hommes mais n'est pas configuré de la même manière. En effet, les aspects de l'intégration sociale affectés par la précarité professionnelle ne sont pas toujours les mêmes pour les femmes et pour les hommes, ou ne sont pas affectés avec la même ampleur (le risque de paupérisation est par exemple plus fort pour les hommes que pour les femmes et touche davantage d'aspects de leur intégration économique).
Les inégalités sociales en lien avec l'exercice d'une activité rémunérée ne sont pas nouvelles. Elles ont pourtant largement disparu du débat public, notamment parce que la Suisse a adopté un mode de régulation du marché du travail qui limite fortement l'intervention de l'Etat au profit de la concertation entre les partenaires sociaux. Ceci contribue à renvoyer les discussions autour des conditions de travail et d'emploi dans les salles de négociation entre patronat et syndicats. Il y a pourtant un intérêt manifeste, dans le contexte actuel, à réintégrer ce débat dans un cercle plus large et à remettre la question des liens entre précarité professionnelle et précarité sociale au centre des préoccupations de l'action publique. En effet, cette étude, confirmant pour la Suisse des éléments déjà mis en évidence à l'étranger, démontre que la précarité professionnelle fait courir un risque social aussi humainement inacceptable que coûteux pour la collectivité. Tout d'abord, celle-ci se substitue de plus en plus aux entreprises pour assurer un minimum vital aux personnes dont les salaires sont insuffisants pour faire vivre leur ménage. Ensuite, elle assume des coûts de santé en augmentation croissante dont une partie est à mettre en lien avec les conséquences négatives de la précarité professionnelle sur la santé. Enfin, l'impact de la précarité professionnelle sur le bien-être psychique pose nécessairement la question du rôle que cette précarité peut jouer dans la hausse des cas d'invalidité pour causes psychiques. Cette hausse, qui mine depuis dix ans la santé financière de cette assurance sociale, serait alors bien davantage le fait de la précarité professionnelle que du chômage comme l'hypothèse en a souvent été émise mais jamais confirmée (même si les deux phénomènes se nourrissent l'un l'autre).
En fin de compte, cette recherche révèle les conséquences individuelles de la précarité professionnelle et met indirectement le doigt sur ses implications économiques et sociales au plan collectif. Elle indique ainsi l'importance d'une prise de conscience politique et par l'ensemble des acteurs concernés du fait que les mutations économiques récentes ne posent pas seulement la question de l'intégration des "surnuméraires" du marché de l'emploi, mais remettent également en cause la capacité du travail à intégrer sans exclure.
Résumé des principaux résultats (extrait du rapport final)
Le travail reste à ce jour un élément fondamental de l'intégration sociale des individus. En tant que "lien organique", il offre bien plus qu'un salaire pour vivre: un statut et une légitimité sociale. A ce titre, son absence involontaire est depuis longtemps reconnue comme l'un des principaux risques d'exclusion sociale, contribuant à l'appauvrissement tant monétaire que social des individus. De là à déduire que le fait d'avoir un emploi protège à lui seul de l'exclusion sociale, il n'y a qu'un pas, souvent franchi, en particulier dans les politiques d'insertion socio-professionnelle. Pourtant, le développement de formes d'emploi atypiques, souvent marquées par la précarité, ou de la pauvreté laborieuse (working poor) révèlent que les choses ne sont pas forcément aussi simples que cela. De fait, dans un contexte de mutations profondes du travail marquées non seulement par le développement d'une précarité de l'emploi (travail temporaire, licenciements, etc.) mais aussi par une précarité du travail (dégradation des conditions de travail dont participent une intensification du travail et une pression à l'extrême flexibilité et adaptabilité des travailleurs et travailleuses), certaines formes d'intégration professionnelle marquée par l'une et/ou l'autre de ces précarités apparaissent désormais contenir, elles aussi, un risque d'exclusion sociale.
Les analyses statistiques menées dans cette recherche confirment globalement ces tendances. La précarité professionnelle est ainsi très directement liée à différents indicateurs de pauvreté et de précarité financière (endettement, retards de paiement, déprivation en biens de consommation durable, bas revenus, etc.), de même qu'à des conditions moins favorables de logement (logement de moindre qualité, moins d'une pièce par personne, etc.). Dans un autre registre, cette précarité professionnelle va de pair avec une moindre participation sociale, tant en ce qui concerne le rapport aux institutions (confiance dans les institutions, participation politique) que les relations interpersonnelles (activités en public, contacts sociaux, soutien de la part des proches). Elle déploie également des effets négatifs sur la santé des individus concernés (état de santé auto-estimé, nombre de jours durant lesquels la personne est gênée dans ses activités habituelles du fait d'un problème de santé, divers problèmes également connus comme des symptômes de stress au travail tels que les problèmes de sommeil, les maux de dos ou de tête, etc.).
Dans tous les cas, la précarité du travail semble jouer, en Suisse, un rôle plus négatif que la précarité de l'emploi. Ainsi, les personnes faisant état d'une insatisfaction dans leur travail (indicateur utilisé pour mesurer la précarité du travail) ressortent comme les plus exposées aux risques d'exclusion sociale tels qu'étudiés dans cette recherche, qu'elles connaissent ou non en parallèle une insécurité de leur emploi. Les personnes qui ne connaissent "que" la précarité de l'emploi apparaissent moins exposées, mais se trouvent malgré tout régulièrement dans des situations moins favorables que celles qui ne connaissent aucune forme de précarité professionnelle.
Ces constats se retrouvent globalement quand on considère l'évolution des situations individuelles: la précarité professionnelle, lorsqu'elle perdure, augmente le risque d'une détérioration de la situation économique, des relations interpersonnelles et de divers aspects de la santé. Ceci se confirme même en tenant compte de l'influence de facteurs connus d'inégalités sociales (âge, formation, ou profession exercée) ou des effets croisés de divers aspects de l'intégration sociale (p.ex. effet de la pauvreté sur la santé). On peut donc affirmer que la précarité professionnelle est
bel et bien un élément moteur dans les processus qui mènent à l'exclusion sociale, même si bien sûr elle n'est pas seule en cause.
Cette recherche vise aussi à éclairer particulièrement les différences entre les sexes sur ce sujet. Celles-ci révèlent la complexité des phénomènes étudiés. Le lien entre précarité professionnelle et exclusion sociale se retrouve tant parmi les femmes que parmi les hommes mais n'est pas configuré de la même manière. En effet, les aspects de l'intégration sociale affectés par la précarité professionnelle ne sont pas toujours les mêmes pour les femmes et pour les hommes, ou ne sont pas affectés avec la même ampleur (le risque de paupérisation est par exemple plus fort pour les hommes que pour les femmes et touche davantage d'aspects de leur intégration économique).
Les inégalités sociales en lien avec l'exercice d'une activité rémunérée ne sont pas nouvelles. Elles ont pourtant largement disparu du débat public, notamment parce que la Suisse a adopté un mode de régulation du marché du travail qui limite fortement l'intervention de l'Etat au profit de la concertation entre les partenaires sociaux. Ceci contribue à renvoyer les discussions autour des conditions de travail et d'emploi dans les salles de négociation entre patronat et syndicats. Il y a pourtant un intérêt manifeste, dans le contexte actuel, à réintégrer ce débat dans un cercle plus large et à remettre la question des liens entre précarité professionnelle et précarité sociale au centre des préoccupations de l'action publique. En effet, cette étude, confirmant pour la Suisse des éléments déjà mis en évidence à l'étranger, démontre que la précarité professionnelle fait courir un risque social aussi humainement inacceptable que coûteux pour la collectivité. Tout d'abord, celle-ci se substitue de plus en plus aux entreprises pour assurer un minimum vital aux personnes dont les salaires sont insuffisants pour faire vivre leur ménage. Ensuite, elle assume des coûts de santé en augmentation croissante dont une partie est à mettre en lien avec les conséquences négatives de la précarité professionnelle sur la santé. Enfin, l'impact de la précarité professionnelle sur le bien-être psychique pose nécessairement la question du rôle que cette précarité peut jouer dans la hausse des cas d'invalidité pour causes psychiques. Cette hausse, qui mine depuis dix ans la santé financière de cette assurance sociale, serait alors bien davantage le fait de la précarité professionnelle que du chômage comme l'hypothèse en a souvent été émise mais jamais confirmée (même si les deux phénomènes se nourrissent l'un l'autre).
En fin de compte, cette recherche révèle les conséquences individuelles de la précarité professionnelle et met indirectement le doigt sur ses implications économiques et sociales au plan collectif. Elle indique ainsi l'importance d'une prise de conscience politique et par l'ensemble des acteurs concernés du fait que les mutations économiques récentes ne posent pas seulement la question de l'intégration des "surnuméraires" du marché de l'emploi, mais remettent également en cause la capacité du travail à intégrer sans exclure.
Chercheur principal
Statut
Completed
Date de début
1 Mai 2003
Date de fin
31 Octobre 2005
Site web du projet
Identifiant interne
30158
identifiant
2 Résultats
Voici les éléments 1 - 2 sur 2
- PublicationMétadonnées seulementMécanismes d’intégration et d’exclusion par le travail dans un environnement économique et social en mutationRapport final établi à l'attention de la Direction du PNR 51. Non publié.