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The migration politics of sexual liberalism. Sex work regulation as subnational migration policymaking in Switzerland from 1992 to 2022
Maison d'édition
Neuchâtel : Université de Neuchâtel
Date de parution
2025-01-31
Nombre de page
363 p.
Mots-clés
- sex work regulation
- sexual liberalism
- politics of migration
- subnational migration policy arenas
- critical frame analysis
- extended case method
- réglementation du travail du sexe
- libéralisme sexuel
- politiques migratoires
- arènes infranationales de la politique migratoire
- analyse critique des cadres
- méthode du cas étendu
Résumé
Depuis 1992, le commerce du sexe en Suisse a été réglementé principalement au niveau infranational (cantonal et municipal) par des approches qui ont été qualifiées de libérales et pragmatiques. Dans le même temps, et dans le contexte d’un régime de migration et de mobilité en pleine transformation et d’une politisation croissante de la migration, la migration a été une préoccupation majeure dans les débats publics et politiques sur le travail du sexe. Cette thèse étudie l’intersection entre les politiques sexuelles et les politiques migratoires, en interrogeant particulièrement comment la problématisation du travail du sexe en tant que question migratoire est allée de pair avec une approche libérale du travail du sexe. Sur la base d’un total de 663 documents analysés, provenant de 11 cantons suisses et de 7 municipalités où un débat substantiel sur le travail du sexe a eu lieu entre 1992 et 2022, je soutiens que, dans une société post-migrante qui évolue autour de luttes constantes sur la migration, les débats sur le travail du sexe sont devenus des arènes infranationales de la politique migratoire. Cela signifie que les débats sur le commerce du sexe et les processus de réglementation dans les cantons et les municipalités suisses ont été influencés par la politique migratoire au niveau national et transnational et par l’évolution de cette politique au cours des trois dernières décennies. Inversement, les processus infranationaux de réglementation du travail du sexe ont également constitué des espaces où les politiques migratoires ont été activement négociées et où les cadres (re)produits ont alimenté le débat plus large sur les migrations. Sur la base d’une analyse thématique des documents collectés, je démontre dans cette thèse que la migration et la mobilité ont été des thèmes saillants dans les débats infranationaux sur le commerce du sexe. À travers une reconstruction approfondie des processus de réglementation du travail du sexe dans 3 cantons qui ont opté pour diverses approches et une analyse critique des cadres menée sur des documents sélectionnés, je retrace l’évolution des définitions des problèmes et des solutions au fil du temps, ainsi que le rôle des actrices et acteurs, des partis politiques et des coalitions. Je soutiens que le libéralisme en matière de travail du sexe ne doit pas seulement être compris comme se référant à une réglementation basée sur des principes libéraux, mais que le libéralisme a fonctionné comme un outil pour gouverner l’industrie du sexe et la mobilité de ses travailleuses. En outre, la réitération discursive du libéralisme en relation avec le travail du sexe a servi à exclure celles qui, sur la base de catégories telles que le genre, l’origine nationale ou ethnique et le statut migratoire, étaient considérées comme incapables de respecter les idéaux libéraux. Enfin, en utilisant la méthode dite du « cas étendu », je montre que les débats sur le travail du sexe ne peuvent être pleinement compris sans tenir compte du contexte politique plus large dans lequel ils s’inscrivent. La réglementation du commerce du sexe dans les cantons et municipalités suisses entre 1992 et 2022 s’inscrit dans le cadre des politiques nationales et transnationales de la migration : Les débats et l’élaboration de politiques infranationales sur le travail du sexe ont alimenté une « politique d’exception » dans les années 1990 et au début des années 2000, lorsque les migrations post-soviétiques étaient au cœur des inquiétudes de l’Europe occidentale quant à la reconfiguration du régime européen de migration et de mobilité et des relations de genre ; ces débats et processus de régulation s’inscrivaient dans une « politique de la différence » au tournant de la décennie 2010, lorsque la liberté de circulation intra-européenne était de plus en plus remise en question et que les gouvernements nationaux cherchaient des moyens de gérer les formes « indésirables » de mobilité ; et ils ont contribué à une « politique de l’exclusion » à un moment où des crises enchevêtrées associées à la migration dans la conscience publique depuis le milieu des années 2010 exacerbaient les polarisations politiques sur la migration. En examinant la réglementation du travail du sexe sous l’angle de la gouvernance des migrations, cette thèse met en avant le fonctionnement du genre et de la sexualité dans les politiques migratoires et montre comment les processus de différenciation produisant des « autres » façonnent les politiques sexuelles et informent les politiques libérales sur la sexualité.
Since 1992, sex work in Switzerland has been regulated mainly at the subnational (cantonal and municipal) level, through approaches that have been described as liberal and pragmatic. At the same time, and in the context of a transforming migration and mobility regime and an increasing politicisation of migration, the migrancy of sex workers has been a salient concern in public and policy debates on sex work. This thesis investigates the intersection of sexual politics with the politics of migration, asking in particular how the problematization of sex work as a migration issue has gone in hand with a liberal approach to sex work. Based on the analysis of a total of 663 policy documents on sex work from eleven Swiss cantons and seven municipalities where a substantial debate on sex work took place between 1992 and 2022, I argue that in a postmigrant society that evolves around constant struggles over migration, debates on sex work have become subnational arenas for migration policymaking. This means that sex work debates and regulation processes in Swiss cantons and municipalities have been influenced by the politics of migration at the national and transnational level and by the evolution of these politics over the past three decades. Conversely, subnational sex work regulation processes also constituted spaces where the politics of migration have been actively negotiated and from where the frames (re)produced have fed into the broader migration debate. Based on a thematic analysis of the collected policy documents, I show in this thesis that migration and mobility were salient themes in subnational debates on sex work. Through an in-depth reconstruction of the sex work regulation processes in three cantons that opted for diverse approaches, and a critical frame analysis of selected documents, I trace the evolution of problem definitions and solutions over time and the role of actors, political parties, and coalitions. I argue that liberalism on sex work should not only be understood as referring to regulation based on liberal principles, but that liberalism functioned as a tool to govern the sex industry and the mobility of its workers. Moreover, the discursive reiteration of liberalism in relation to sex work served to exclude those who, based on categories of gender, national or ethnic origin, and migrant status, were considered incapable of living up to liberal ideals. Finally, by using extended case method, I show that debates on sex work cannot be fully understood in isolation from the wider political context in which they take place. The regulation of sex work in Swiss cantons and municipalities between 1992 and 2022 was part of the national and transnational politics of migration: Subnational debates and policymaking on sex work fed into a ‘politics of exception’ in the 1990s and early 2000s, when post-Soviet migrations were at the heart of Western European anxieties about the reconfiguration of the European migration and mobility regime and gender relations; these debates and regulation processes were part of a ‘politics of difference’ around the turn of the decade 2010, when intra-European freedom of movement was increasingly called into question and national governments sought out ways to steer ‘undesired’ forms of mobility; and they contributed to a ‘politics of exclusion’ at a moment of entangled crises that were linked to migration in the public consciousness since the mid-2010s, exacerbating political polarizations in relation to migration. By looking at the regulation of sex work through a migration governance lens, this thesis foregrounds the workings of gender and sexuality in the politics of migration, and contributes to an understanding of how processes of differentiation producing migrant ‘others’ shape sexual politics and inform sexually liberal policies.
Notes
UniNE, FLSH, Forum suisse des migrations (SFM), soutenue le 31 janvier 2025
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Type de publication
doctoral thesis