Voici les éléments 1 - 1 sur 1
  • Publication
    Restriction temporaire
    Rethinking the evolution of vocal complexity: structured call sequences in olive colobus monkeys
    (Neuchâtel : Université de Neuchâtel, 2025) ;
    Selon la théorie actuelle, les systèmes de communication complexes émergent principalement en réponse à deux pressions de sélection, soit sociale, soit écologique. La première, que l'on peut appeler “l'hypothèse de la complexité sociale”, postule que la communication complexe émerge principalement chez des espèces ayant des structures sociales complexes qui nécessitent une coordination et une négociation fréquentes entre individus d’un même groupe. La seconde, que l'on peut nommer “l'hypothèse de la complexité écologique”, suggère que les pressions environnementales, particulièrement la prédation, favorisent l’émergence d’une communication complexe. Ces deux hypothèses ont été testées principalement chez des espèces hautement sociales vivant en grands groupes avec une organisation complexe telle que la dynamique de fission-fusion, laissant des lacunes significatives dans notre compréhension de l'évolution de la complexité dans les systèmes de communication d’espèces formant de petits groupes cohésifs. Plusieurs espèces avec des structures sociales relativement simples et une pression de prédation faible présentent néanmoins des systèmes de communication remarquablement complexes. Les displays élaborés de chants chez les gibbons, par exemple, soulèvent des questions quant à savoir si ces deux cadres théoriques expliquent de manière exhaustive l'ensemble des phénomènes observés, et suggèrent que des forces sélectives supplémentaires pourraient influencer l'évolution vers des systèmes de communication complexes. Les colobes olive constituent un modèle idéal pour approfondir cette problématique. Contrairement à de nombreux primates, les colobes olive sont une espèce hautement cryptique, ils manifestent très peu de comportements affiliatifs ou agonistiques et vivent en petits groupes, des facteurs traditionnellement associés à des systèmes de communication simples. En étudiant empiriquement la communication vocale de cette espèce dans une forêt tropicale d'Afrique de l'Ouest, cette thèse vise à mieux comprendre la relation évolutive entre la communication des primates et les pressions sélectives conduisant à leur complexification. Pour aborder cette question, j'ai d'abord exploré le répertoire vocal des colobes olive. Conformément aux prédictions des hypothèses de complexité sociale et écologique, j'ai trouvé un système de communication très limité composé de seulement deux types de cris. Cependant, j'ai également découvert un système combinatoire étonnamment riche dans lequel les deux types de cris étaient assemblés en séquences structurées syntaxiquement, pour faire référence à différents dangers (aigles, léopards et chutes d'arbres). Le contenu de cette étude est publié sous Gallot et al. (2024). Dans une deuxième étude complémentaire, j'ai examiné si et comment les différentes séquences de cris permettaient aux auditeurs de faire des prédictions sur les référents à l’origine des cris d’alerte. En utilisant des concepts de la théorie de l'information, divergence de Kullback-Leibler et analyses de gain de prédiction, j'ai identifié une grammaire simple permettant un traitement incrémental. Plus précisément, les cris initiaux dans les séquences discriminaient de façon fiable les menaces urgentes des non-urgentes, tandis que les positions ultérieures augmentaient la spécificité référentielle concernant les principaux types de prédateurs, aigles, léopards, et autres dangers. Ces résultats, publiés dans Gallot et al. (2025), ont fourni la preuve que la communication des primates non-humains est structurée d’une manière permettant un traitement prédictif de l’information, ce qui a des implications sur le fonctionnement du cerveau des primates en général et, par extension, sur les origines évolutives du langage. Dans une troisième étude, j'ai examiné la relation entre socialité et complexité vocale à travers une gamme plus large de contextes, y compris des situations non dangereuses. Ici, des données observationnelles ont été recueillies auprès d'un groupe de colobes olive semi-habitué. J'ai pu documenter que ces singes produisaient aussi, et de manière extensive, des séquences vocales en dehors des contextes de prédation, malgré leur mode de vie généralement cryptique. J'ai ensuite comparé les séquences vocales produites dans ces situations non dangereuses avec le précédent jeu de données expérimentales collectées en réponse à différents dangers. J'ai trouvé une complexité syntaxique plus grande dans les situations non dangereuses par rapport aux événements dangereux et un effet spatial prononcé. La complexité syntaxique était spécifiquement plus élevée en périphérie du domaine vital par rapport à son centre, vraisemblablement parce que les émetteurs des séquences de cris tentaient de communiquer avec des membres absents de leur groupe (lors de visites de courte durée dans des groupes voisins). J'ai pu en conclure que "l'hypothèse de la complexité sociale" nécessite des modifications, dans le sens où la complexité d’un système de communication vocal peut émerger non seulement pour réguler et coordonner les interactions sociales à courte distance, mais aussi pour maintenir un réseau social sur de longues distances. En conclusion, ces résultats démontrent qu'une communication vocale complexe, basée sur la production de séquences de cris, peut évoluer chez des espèces ayant des structures sociales simples et un faible risque de prédation, remettant en question les vues traditionnelles sur la relation entre socialité et communication. Bien que les colobes olive ne possèdent qu'un répertoire vocal très limité, ils sont capables de créer des séquences structurées syntaxiquement pouvant transmettre des informations spécifiques sur de longues distances. Ce type de communication est adapté non seulement pour référer aux prédateurs et autres dangers, mais aussi pour maintenir le contact entre des membres du groupe spatialement dispersés. Avec ces résultats, j'espère contribuer à une compréhension plus large des diverses voies évolutives vers la complexité dans la communication animale et à approfondir notre compréhension de la façon dont certaines variables sociales agissent comme pressions de sélection. ABSTRACT According to current theory, complex communication systems mostly evolve in response to two major selection pressures rooted in either social or ecological challenges. The first one, which may be called the ‘social complexity ypothesis’, posits that sophisticated communication emerges primarily in species with intricate social structures that require frequent coordination and negotiation among group members. The second one, which may be termed the ‘ecological complexity hypothesis’, suggests that environmental pressures, particularly predation, drive the evolution of complex signalling. The two hypotheses have predominantly been tested in highly social species living in big groups with complex group organisation such as fission-fusion dynamics, leaving significant gaps in our understanding of how communication complexity evolves in species with small cohesive groups. Several species with relatively simple social structures and minimal predation pressure nevertheless exhibit remarkably complex communication systems. The elaborate song displays of gibbons, for instance, raises the questions of whether these two theoretical frameworks comprehensively explain the full range of observed phenomena, and suggests that additional selective forces may be influencing the evolution of communicative complexity in ways not fully captured by current models. Olive colobus monkeys provide an ideal model species to further investigate the problem. Unlike many primates, olive colobus monkeys are a highly cryptic species but they also show very little affiliative or agonistic behaviours and live in small group sizes—factors traditionally associated with simple communication systems. By empirically investigating the vocal communication system of this species in a West African rainforest, this thesis aims to better understand the evolutionary relationship between primate communication and the selective pressures driving their complexification. To address this, I first explored the vocal repertoire of olive colobus monkeys. In line with predictions from the social and ecological complexity hypotheses, I found a limited communication system consisting of only two call types. However, I also discovered an unexpectedly rich combinatorial system in which the two call types were assembled into syntactically structured sequences to refer to different dangers—eagles, leopards and falling trees. The content of this study is published as Gallot et al. (2024). In a second follow-up study, I examined whether and how the different call sequences allowed listeners to make predictions about the call-eliciting referents. Using concepts from information theory—Kullback-Leibler divergence and prediction gain analyses—I identified a simple grammar capable of incremental processing. Specifically, sequence-initial positions reliably discriminated urgent from non-urgent threats, while subsequent positions increased the referential specificity regarding the main predator types—eagles, leopards—and other non-predatory disturbances. These results, published in Gallot et al. (2025), provided evidence that non-human primate communication is structured in ways that make it adapted for predictive processing, which has some implications about how primate brains operate and, by extension, the early evolutionary roots of language. In a third study, I investigated the relationship between sociality and vocal complexity across a wider range of contexts, including non-dangerous situations. Here, observational data were collected from one semi-habituated olive colobus group. I was able to document that the monkeys also made extensive use of vocal sequences outside predation contexts, despite their generally cryptic lifestyle. I then compared the vocal sequences produced in these non-threatening situations with the previous experimental dataset collected in response to different dangers. I found greater syntactic complexity in non-dangerous situations compared to dangerous events and a pronounced spatial effect. Syntactic complexity was specifically greater in the home range periphery compared to the centre, presumably because callers were trying to communicate with absent group members on short-term visits to neighbouring groups. I discussed these patterns by concluding that the ‘social complexity hypothesis’ may require modifications, in the sense that complexity evolves not only for regulating and coordinating close-range social interactions but also for maintaining social networks over long distances. In conclusion, these findings demonstrate that complex and especially sequence-based vocal communication can evolve in species with seemingly simple social structures and low predation risk, challenging traditional views on the relationship between sociality and communication. Although olive colobus monkeys only possess a limited vocal repertoire, they are able to create syntactically structured sequences capable of conveying specific information over long distances. This type of communication is adapted not only to refer to predators and other dangers, but also to maintain contact between spatially dispersed group members. With these results I hope to contribute to a broader understanding of the diverse evolutionary pathways towards complexity in animal communication and to further our comprehension of how social variables act as selection pressures.