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    Des paysans, il en faudra toujours...: la reprise de l'exploitation familiale et les perspectives d'avenir de jeunes agriculteurs fribourgeois
    Dans la première partie de ce travail, je donne une description de la vie quotidienne des paysans fribourgeois : soins au bétail, travaux des champs, « paperasse », … mais aussi activités sociales professionnelles ou non. J’ai tenté de faire ressortir un « ethos » qui dirige les pratiques et les discours du paysan et qui lui permet de s’identifier à une figure du « bon paysan ». Cet « ethos » valorise la propreté et l’ordre sur l’exploitation, le travail acharné, l’indépendance et le juste équilibre des dépenses. De sa conformité à ce modèle, le paysan retire une image valorisante de soi, pour lui-même et pour ses semblables, qui lui sert de capital social et symbolique pour se positionner dans un « champ » agricole où se comparent et se concurrencent les paysans et leurs exploitations. L’enjeu de cette rivalité est d’occuper les positions dominantes qui sont source de prestige et d’un certain pouvoir. Cette analyse de l’« ethos » paysan sert de toile de fond pour la deuxième partie du travail qui est consacrée plus particulièrement à la transmission de l’exploitation familiale et aux perspectives d’avenir des jeunes agriculteurs fribourgeois. Les exploitations agricoles fribourgeoises et suisses sont dans leur immense majorité familiales. Cette constatation a deux conséquences principales. La première concerne la main d’oeuvre. Elle est composée principalement de membres d’une même famille qui se répartissent les tâches selon des consignes précises dépendant de la place de la personne dans cette famille. La question de l’autorité sur l’exploitation est centrale durant la période de la transmission de l’exploitation. Celle-ci constitue une sorte d’interrègne durant lequel un certain flou demeure quant aux relations de pouvoir entre successeur et succédé. La deuxième conséquence est liée à la perpétuation du patrimoine. Celle-ci se fait en deux temps : la succession à la place de chef d’exploitation et le rachat du domaine. La règle qui semble prévaloir prescrit une succession unique à la tête d’un domaine indivisé. Les cohéritiers doivent alors se ‘sacrifier’ pour la perpétuation du patrimoine et se contenter de ‘lots de consolation’. La perpétuation du domaine familial est d’une importance capitale. C’est peut-être pour cela que les fils de paysans s’attachent parfois dès leur plus jeune âge à la vie de paysan et ne semblent pas envisager d’autre avenir que de succéder à leur père. Les conditions actuelles de l’agriculture helvétique ne permettent toutefois pas de se contenter de continuer comme son père. Il faut envisager des changements. Les jeunes paysans parlent de partir au Canada, de moderniser leurs installations, de créer des associations qui diminueraient les frais des exploitations, d’agrandir leurs domaines… Mais les terres sont rares, les associés difficiles à supporter et les transformations coûteuses… Ces adaptations, autant nécessaires qu’elles puissent l’être, ne seront peut-être pas possibles sans des changements plus profonds et une redéfinition de ce que c’est qu’« être paysan ».