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Serrano, Sophie
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Serrano, Sophie
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Doctorante
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sophie.serrano@unine.ch
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- PublicationRestriction temporaireBecoming a moral entrepreneur : a study of the backstage of the Genevan philanthropic networkThis thesis explores the process of becoming a moral entrepreneur, defined by Howard S. Becker as being a social actor who desires to improve society by implementing their worldviews. Studying these ‘rule creators’ is crucial to understanding social regulation more broadly. Yet, the notion of moral entrepreneur remains vague in academic literature, diminishing its force and relevance. While much attention has been paid to moral entrepreneurs and their activities in the public arena, little is known about moral entrepreneurs themselves and how they shape their personas for this role. This research proposes to fill that gap by investigating behind the curtain of their public personas. Using the metaphor of theatre, we explore the ‘backstage’—the hidden realm where moral entrepreneurs craft their public performance. By examining this backstage area, it becomes possible to reveal the work and strategies undertaken by moral entrepreneurs to establish themselves as worthy actors of the public arena. I propose that philanthropy serves as an interesting case of moral enterprise. Similarly to the moral entrepreneur, philanthropists aim to improve society by funding causes that typically align with their values. Drawing a parallel between philanthropy and moral enterprise also resonates with recent sociological literature, which tends to restore to philanthropy its social, institutional, economic, and political foundations. More specifically, this study concentrates on philanthropic activities in Geneva, Switzerland between 2018 and 2022. The Canton of Geneva is home to numerous philanthropic foundations and boasts a long philanthropic tradition. Over the past decade, this region has become the stage for philanthropy-related initiatives, such as the establishment of an academic centre for philanthropy at the University of Geneva. The object of study lies at the interface of organizations (foundations) and individuals (philanthropists, recipients, experts). To comprehend this system and its significance for its participants, a mixed-methods research strategy is employed. A social network analysis (SNA), based on a new dataset comprising more than 1200 foundations and their members, allows for understanding how Genevan philanthropy is structured. Complementarily, an ethnographic investigation (encompassing 33 interviews, 72 hours of observations, and 94 analysed documents) enables an understanding of what this structure means for the actors, how they are influenced by it, and conversely, how they influence the structure. The main empirical findings of this thesis are twofold. First, it reveals that becoming a moral entrepreneur is a process. The research demonstrates the extensive behind-the-scenes work required to attain this status. By uncovering this work, it shows that the moral entrepreneur is not a deus ex machina, but rather a social actor actively building their legitimacy and carving out their place in society. The process involves collective and epistocratic organization, instrumentalization of public problems, prioritization of social harms, and knowledge production as a legitimation device. Second, this thesis sheds light on the aims of moral enterprise. Drawing on my results, I argue that a moral enterprise is fundamentally a process of depoliticization. Unlike other social movements that politicize a cause by bringing it into the public arena and prompting public discussion about it, moral enterprise aims to avoid the debate and impose a single approach to addressing the issue––one that is perceived as THE right way by moral entrepreneurs. This is achieved by adopting market-like practices and thinking in most of their activities. These findings contribute to debates on moral entrepreneurs and moral enterprise, allowing for better delineation of both concepts. Consequently, this thesis reinjects power and relevance into notions that have been misused in the literature. More broadly, by revealing how rule creators construct themselves as such, it questions the very rules we are following as a society and will hopefully allow us to think beyond them. La figure de l'entrepreneur moral, conceptualisée par Howard S. Becker comme un acteur social aspirant à transformer la société selon sa vision du monde, reste paradoxalement peu étudiée pour elle-même. Si son rôle est crucial pour comprendre les mécanismes de régulation sociale, la recherche s'est davantage concentrée sur ses actions publiques que sur la construction de son statut de « créateur normes ». Cette thèse propose de lever le voile sur les coulisses de l'entrepreneuriat moral. En utilisant la métaphore théâtrale, ma recherche explore l'espace caché où les entrepreneurs moraux façonnent leur performance publique. Cette approche permet de mettre en lumière les stratégies qu'ils déploient pour s'établir comme acteurs légitimes dans l'arène publique. La philanthropie contemporaine offre un terrain d'étude privilégié pour cette analyse : à l'instar des entrepreneurs moraux, les philanthropes cherchent à améliorer la société en finançant des causes alignées sur leurs valeurs. Ce parallèle s'inscrit dans la continuité des travaux sociologiques récents qui replacent la philanthropie dans ses contextes sociaux, institutionnels, économiques et politiques. Mon étude se concentre sur Genève (Suisse) entre 2018 et 2022, un territoire riche d'une longue tradition philanthropique et siège de nombreuses fondations. Cette dernière décennie a vu l'émergence d'initiatives majeures, notamment la création d'un centre académique dédié à la philanthropie au sein de l'Université de Genève. Pour appréhender ce système complexe à l'interface des organisations et des individus, j'ai adopté une méthodologie mixte. Une analyse de réseaux sociaux portant sur plus de 1200 fondations et leurs membres révèle la structure de la philanthropie genevoise, tandis qu'une enquête ethnographique approfondie (33 entretiens, 72 heures d'observations, 94 documents) éclaire le sens que les acteurs donnent à leurs pratiques et les dynamiques d'influence réciproque entre structure et agents. Mes résultats mettent en évidence deux aspects fondamentaux. Premièrement, devenir entrepreneur moral est un processus qui requiert un travail considérable en coulisses. Loin d'être un deus ex machina, l'entrepreneur moral construit activement sa légitimité à travers une organisation collective et épistocratique, l'instrumentalisation des problèmes publics, la hiérarchisation des préjudices sociaux et la production de connaissances comme outil de légitimation. Deuxièmement, l'entreprise morale apparaît comme un processus de dépolitisation. Contrairement aux mouvements sociaux qui politisent leurs causes en suscitant le débat public, l'entreprise morale cherche à imposer une approche unique - celle que ses entrepreneurs considèrent comme la seule valable - en adoptant des pratiques et une pensée issues du monde marchand. Ces conclusions enrichissent significativement notre compréhension des entrepreneurs moraux et de l'entreprise morale, permettant une délimitation plus précise de ces concepts souvent mal utilisés dans la littérature. Plus largement, en dévoilant les mécanismes de construction des « créateurs de normes », cette recherche invite à interroger les lois et règles qui régissent notre société et même à relativiser leur pertinence. La figure de l'entrepreneur moral, conceptualisée par Howard S. Becker comme un acteur social aspirant à transformer la société selon sa vision du monde, reste paradoxalement peu étudiée pour elle-même. Si son rôle est crucial pour comprendre les mécanismes de régulation sociale, la recherche s'est davantage concentrée sur ses actions publiques que sur la construction de son statut de « créateur normes ». Cette thèse propose de lever le voile sur les coulisses de l'entrepreneuriat moral. En utilisant la métaphore théâtrale, ma recherche explore l'espace caché où les entrepreneurs moraux façonnent leur performance publique. Cette approche permet de mettre en lumière les stratégies qu'ils déploient pour s'établir comme acteurs légitimes dans l'arène publique. La philanthropie contemporaine offre un terrain d'étude privilégié pour cette analyse : à l'instar des entrepreneurs moraux, les philanthropes cherchent à améliorer la société en finançant des causes alignées sur leurs valeurs. Ce parallèle s'inscrit dans la continuité des travaux sociologiques récents qui replacent la philanthropie dans ses contextes sociaux, institutionnels, économiques et politiques. Mon étude se concentre sur Genève (Suisse) entre 2018 et 2022, un territoire riche d'une longue tradition philanthropique et siège de nombreuses fondations. Cette dernière décennie a vu l'émergence d'initiatives majeures, notamment la création d'un centre académique dédié à la philanthropie au sein de l'Université de Genève. Pour appréhender ce système complexe à l'interface des organisations et des individus, j'ai adopté une méthodologie mixte. Une analyse de réseaux sociaux portant sur plus de 1200 fondations et leurs membres révèle la structure de la philanthropie genevoise, tandis qu'une enquête ethnographique approfondie (33 entretiens, 72 heures d'observations, 94 documents) éclaire le sens que les acteurs donnent à leurs pratiques et les dynamiques d'influence réciproque entre structure et agents. Mes résultats mettent en évidence deux aspects fondamentaux. Premièrement, devenir entrepreneur moral est un processus qui requiert un travail considérable en coulisses. Loin d'être un deus ex machina, l'entrepreneur moral construit activement sa légitimité à travers une organisation collective et épistocratique, l'instrumentalisation des problèmes publics, la hiérarchisation des préjudices sociaux et la production de connaissances comme outil de légitimation. Deuxièmement, l'entreprise morale apparaît comme un processus de dépolitisation. Contrairement aux mouvements sociaux qui politisent leurs causes en suscitant le débat public, l'entreprise morale cherche à imposer une approche unique - celle que ses entrepreneurs considèrent comme la seule valable - en adoptant des pratiques et une pensée issues du monde marchand. Ces conclusions enrichissent significativement notre compréhension des entrepreneurs moraux et de l'entreprise morale, permettant une délimitation plus précise de ces concepts souvent mal utilisés dans la littérature. Plus largement, en dévoilant les mécanismes de construction des « créateurs de normes », cette recherche invite à interroger les lois et règles qui régissent notre société et même à relativiser leur pertinence.
- PublicationAccès libreLe marché des préjudices sociaux: le cas de la philanthropie genevoise(2023)Cet article se propose d’explorer une boîte noire de la littérature zémiologique portant sur les préjudices sociaux (social harms): la priorisation de ces préjudices dans l’arène publique. Le cas d’étude de la philanthropie genevoise permet de comprendre quelles situations sociales sont priorisées et pourquoi. À travers une méthodologie qualitative (entretiens et observations), cette étude décrit les processus de priorisation en mobilisant la métaphore du «marché des préjudices sociaux». Cet article suggère que la philanthropie sélectionne les préjudices sociaux à financer selon une évaluation basée sur les risques réputationnels et économiques. Cette évaluation est collective et dépend de dynamiques sociales. Enfin, cet article dévoile les conséquences de ce marché: le surfinancement de causes non controversées, la favorisation des désirs du philanthrope au détriment des besoins sociaux et la dépolitisation de la priorisation des préjudices sociaux dans l’arène publique.
- PublicationAccès libreThe market for social harms: A case study of Genevan philanthropy(2022)This article explores a remaining black box in the criminological literature on public problems: the prioritisation of the problem in the public arena. The research uses the case study of Genevan philanthropy to address the prioritisation of harms by moral entrepreneurs. Employing a qualitative methodology, it describes the prioritisation process by using the ‘market for social harms’ metaphor. It argues that philanthropists select their harms according to a risk/benefit assessment, which stems from the business world. This valuation of harms is collective and dependent on the competition and co‐operation between philanthropists. Finally, by detailing this metaphor, the study provides the key to obtaining a more general understanding of the prioritisation process.
- PublicationAccès libreCréation de normes et réponses aux situations-problèmes en autogestion : Enquête ethnographique dans un espace culturel autogéré en Suisse(2018)Cet article questionne la création de normes et la réponse à la transgression dans un espace où chaque membre possède le même pouvoir de décision. Nos pistes de réflexions sont issues d’une enquête de terrain au sein d’un espace culturel autogéré (ECA) en Suisse. Ce lieu, en plus de proposer une offre culturelle alternative, revendique un «vivre autrement» au point d’être parfois considéré comme en marge des normes et valeurs de la société dans laquelle il évolue. Cette enquête constate un cadre normatif flou et fluctuant, et met en évidence que lorsqu’un individu est auteur d’un acte probl-é matique, à défaut de procédures claires, un schéma d’événements réactif se met en place pour y répondre. Celui-ci a pour objectif de définir le degré de problématisation dudit acte et, le cas échéant, de développer une stratégie en réponse. Pour faire face à de tels «actes-problème», le principal outil est la discussion collective caractérisée par une position similaire de chaque membre dans le processus de prise de décisions. Certains enjeux, propres au fonctionnement autogéré, ont été soulevés et concordent avec la littérature portant sur ces espaces. Cependant, cette recherche souligne que ce fonctionnement particulier repose sur des éléments relevant à la fois du développement de politiques publiques et de la justice réparatrice. En particulier, cette contribution di-s cute de la perception de l’«acte-problème» par les membres de l’espace culturel autog-é ré, lequel se base moins sur son auteur que sur ses conséquences. Enfin, elle réfère aux stratégies développées par la discussion qui privilégient la résolution de problème en se refusant autant que possible à la rétribution.