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    Respiratory physiology and anthropophilic behavioural traits of the main malaria vector "Anopheles gambiae" Giles (Diptera: Culicidae)
    (2018)
    Frei, Jérôme
    ;
    La vie adulte des moustiques est marquée par la répétition de séquences comportementales incluant: la recherche d’un partenaire sexuel, la recherche de ressources (repas sanguin sur un hôte ou sucre d’origine végétale) et la recherche d’un site de ponte ; ces séquences comportementales étant intercalées de périodes plus ou moins longues de repos. L’entreprise de l’un ou l’autre de ces comportements typiques est influencée par des facteurs aussi bien internes (comme par exemple le bagage génétique ou l’état physiologique) qu’externes (comme les conditions environnementales ou les signaux émis par l’hôte). Dans ce contexte, le principal vecteur de la malaria, Anopheles gambiae Giles (An. gambiae), se distingue d’autres moustiques en plusieurs points : il commence sa vie adulte avec peu de réserves métaboliques, il concentre ses repas sanguins et doit souvent même les multiplier, afin de pouvoir pondre. Ce moustique est endophage, endophile et démontre un comportement anthropophile (préférence à piquer des êtres humains à par rapport à d’autres vertébrés) dicté principalement par la signature olfactive de l’homme. Dans cette thèse, je me suis donc intéressé à la physiologie respiratoire et à l’identification de signaux chimiques potentiels typiques à l’homme qui régulent la vie adulte de ce moustique.
    Comprendre comment ce moustique échange les gaz respiratoires avec son environnement ou quel schéma respiratoire (SR) il utilise est fondamental, car on en sait très peu sur la physiologie respiratoire des insectes de petite taille. En tant que petit ectotherme et sachant que ce moustique est particulièrement dépendant de l’hématophagie pour répondre à ses besoins métaboliques de base, une meilleure compréhension des variations de son SR en fonction de sa taille et de la température est également importante. Pour ce faire, un système de respirométrie à flux continu a été poussé vers ses limites en termes de précision et de résolution temporelle, afin de résoudre le SR utilisé par An. gambiae. Au repos, le SR de An. gambiae est caractérisé par la répétition cyclique d’événements excrétoires de CO2 marqués, suivis de périodes d’émission plus basses. Les composantes sous-jacentes constituant le SR ont pu être identifiées et quantifiées. Ces dernières incluent : le taux métabolique au repos représente par le taux de production standard de CO2 au repos (sV̇CO2), la durée (Pint) et le taux d’émission de CO2 (iV̇CO2) entre les événements excrétoires de CO2 marqués, ainsi que la fréquence (F), le volume (Vb), l’amplitude (A) et la durée (Pb) de ces derniers. Sur l’intervalle de taille et de température expérimentés, sV̇CO2 varie d’un facteur de 10 (20 à 32°C, 0.9 à 2.3 mg, 0.6 à 6 μl CO2/heure). Une analyse par régressions multiples démontre une relation positive et isométrique de sV̇CO2 avec la taille et un Q10 apparent de 2.13 (pour une augmentation de 10°C, sV̇CO2 est plus que doublé). Sachant qu’un taux métabolique plus élevé imposé par l’environnement pourrait provoquer une recherche de ressources nutritionnelles accrue, voire un contact plus fréquent avec l’hôte, cette relation est un fondement important pour toute tentative de modélisation bottom-up des maladies transmises par les moustiques. La comparaison entre deux groupes d’âges distincts démontre un sV̇CO2 plus bas et mieux maîtrisé chez les An. gambiae plus âgés (6 jours), suggérant ainsi un âge optimal pour le contrôle du métabolisme. Les individus présentant un sV̇CO2 particulièrement bas, en plus de respirer de manière cyclique, respirent aussi de manière discontinue (échanges de gaz proche de 0 durant la période de basse émission). En activité, An. gambiae utilise un SR continu. Il est conclu que ce petit insecte est capable d’utiliser les 3 SR décrits à ce jour dans la littérature chez les insectes (SR continu, cyclique et cyclique/discontinu). Lors d’une augmentation de température, il est démontré que F module fortement le taux d’échanges gazeux en augmentant plus vite que le taux métabolique au repos. Ce découplage est compensé par une diminution de Vb, suggérant ainsi une diminution de la capacité tampon pour le CO2 dans l’hémolymphe lorsque la température augmente. F varie indépendamment de la masse corporelle, alors que Vb augmente de manière disproportionnée avec cette dernière, suggérant ainsi un volume trachéal relativement plus élevé chez les individus de plus grande taille. Si l’on tient compte de leur taille et de la variété de comportements que les moustiques sont capables d’entreprendre durant leur vie adulte, il est suggéré que la capacité d’utiliser divers SR peut être un avantage, afin d’adapter le schéma respiratoire à la demande métabolique imposée selon les circonstances rencontrées durant la vie adulte.
    An. gambiae, en plus d’être anthropophile, montre même une préférence pour certains types d’humains. Il est connu que le mécanisme derrière ce comportement sélectif est médié par l’odeur émise par l’hôte. La seconde partie de cette thèse s’est donc concentrée sur l’identification de signaux chimiques émis par l’hôte potentiellement impliqués dans ce comportement sélectif. Pour ce faire, un paradigme expérimental intégrant une bonne évaluation du comportement dans des conditions expérimentales optimales a été développé et utilisé. Ce dernier comprend : i) une population test de moustiques adultes spécialement élevée et prête à rechercher un hôte, ii) un olfactomètre amélioré à deux ports permettant de mesurer l’intensité de la réponse chimioanémotaxique du moustique et sa capacité discriminative en redirigeant son vol vers l’une des deux odeurs sources présentées, iii) la présence inhérente de fluctuations de CO2 contrôlées afin de simuler la présence de deux hôtes potentiels et augmenter la sensitivité des moustiques et iv) des conditions de vol optimales (température, humidité et vitesse du vent).
    Les fluctuations de CO2 ont pu être mesurées et reproduites de manière consistante dans les deux ports de l’olfactomètre. Cette stimulation a augmenté la réceptivité des moustiques à répondre à des odeurs. Des expériences conduites avec l’ajout d’acide lactique (une signature olfactive humaine d’origine eccrine) dans un des ports de l’olfactomètre confirment que ce compose volatile n’intensifie pas la réponse chimioanémotaxique de An. gambiae mais influence son comportement discriminant. Après avoir validé le paradigme expérimental avec l’acide lactique, ce dernier a été utilise pour évaluer la réponse du vecteur à des odeurs provenant de l’incubation de sueur mâle et femelle avec 3 espèces de bactéries peuplant l’aisselle humaine. Staphylococcus epidermidis a été choisi car il produit une odeur moins intense, alors que Corynebacterium jeikeium et Staphylococcus haemolyticus ont été choisi pour leurs contributions biologiques importantes dans la production d’une odeur axillaire intense. Ces deux dernières bactéries, par le biais d’une activité enzymatique spécifique et prononcée, libèrent respectivement des acides carboxyliques dont notamment le (R)/(S)-3-hydroxy-3-methylhexanoique acide (HMHA) et des composés volatiles soufrés tel que le (R)/(S)-3-methyl-3-sulfanylhexane-1-ol (MSH). Les expériences avec l’olfactomètre démontrent que les trois bactéries, de par leur action sur la sueur mâle ou femelle, libèrent des composés volatiles influençant le comportement aussi bien chimioanémotaxique que discriminant de An. gambiae. Si le vecteur n’a pas pu distinguer la sueur mâle de la sueur femelle stérile, l’action de chaque bactérie a rendu la sueur mâle plus attractive de manière consistante. L’action de Corynebacterium jeikeium a généré la réponse chimionanémotaxique la plus intense et a engendré la préférence la plus forte pour la sueur mâle. Les composés volatiles HMHA et MSH sont suspectés d’être propres à l’odeur humaine mais aucun des deux composés volatiles n’a généré de préférence telle que celle observée pour l’acide lactique. Il n’est cependant pas exclu que ces deux signaux chimiques influencent le comportement du moustique au moment où il approche l’hôte ou encore engendre une activation suivie d’un vol soutenu en direction de l’hôte à des distances plus éloignées., Anopheles gambiae Giles (An. gambiae) is the main vector of malaria. To fulfil metabolic demand An. gambiae is particularly dependent on blood feeding which is an important driving force of its strong vectorial capacity. It is therefore important to better understand how its metabolism scales with body size and, as an ectotherm, evaluate the thermal sensitivity of its metabolism. Meanwhile, understanding how respiratory gases are exchanged, which gas exchange pattern (GEP) is employed by An. gambiae is also of broader importance as little is known about the respiratory physiology of smaller insects. For this purpose a flow-through respirometer system was pushed to its limit in terms of both its precision and temporal resolution in order to fully resolve the GEP of resting female An. gambiae. The underlying components constituting the GEP could be identified and quantified, including: the standard CO2 production rate of resting An. gambiae (sV̇CO2) as a proxy for resting metabolic rate, the inter-burst CO2 emission rate (iV̇CO2) and duration (Pint), and CO2 burst frequency (F), duration (Pb), amplitude (A) and volume (Vb). Over the temperatures and body size ranges tested, sV̇CO2 varied over a 10-fold range (20 to 32°C, 0.9 to 2.3 mg, 0.6 to 6 μl CO2/hour). Multiple regression analysis demonstrates a positive and almost isometric scaling with living body mass and an apparent Q10 of 2.13, i.e. for a 10°C increment sV̇CO2 is more than doubled. Comparison of two age groups reveals lower and more controlled sV̇CO2 by older (6 days) An. gambiae, suggesting the existence of an optimum age for metabolic control. Considering that a higher metabolic demand imposed by the environment may enhance foraging and contact to hosts, these relationships provide an important foundation for bottomup modelling for diseases transmitted by mosquitoes.
    At rest, the GEP of An. gambiae can be characterised by the cyclic repetition of CO2 bursts intercalated with inter-burst periods with a lower CO2 emission rate. Individuals presenting particularly low sV̇CO2 values exchange respiratory gases not only cyclically but also discontinuously (gas exchange is negligible during inter-burst periods). Disturbed An. gambiae presented a continuous GEP. It is concluded that An. gambiae uses all three GEPs described so far in the literature. With increasing temperature it is shown that F strongly modulates the gas exchange rate by increasing faster than sV̇CO2. This discrepancy is almost compensated by lower Vb values at higher temperature suggesting a decrease in the haemolymph buffering capacity for CO2 with increasing temperature. F is independent of body mass whereas Vb scales out of proportion with body size suggesting a relatively larger tracheal volume in bigger mosquitoes. Considering mosquito size and the wide panel of behaviours undertaken during adult life, it is suggested that the ability to employ various GEPs and modulating its components might be an advantage to adapt the respiratory gas exchange pattern used (discontinuous and cyclic to only cyclic and eventually to continuous) to metabolic demand depending on the situation encountered in adult life.
    Another major contributor to the vectorial capacity of An. gambiae is its odour-mediated preference to bite humans over other vertebrate host and certain human types over others. The second part of the thesis focuses on the identification of potential infochemicals that may explain this odour-mediated anthropophilic and discriminative host seeking behaviour of An. gambiae. For this purpose an experimental paradigm integrating both a sound behavioural evaluation concepts and an appropriate testing environment is used. An improved dual-choice olfactometer that tests the host seeking behaviour of An. gambiae in the presence of continuous well-controlled intermittent CO2 stimulation is presented in both arm is developed. This background stimulation simulates the presence of two potential hosts whilst acting as a releaser of odour perception. Olfactometer tests with lactic acid, a human eccrine signature, added on one arm in the presence of CO2 pulses as sensitizer, confirm earlier findings that this infochemical not necessarily augments anemochemotactic upwind flight of the insect vector but influences the mosquito’s discriminative behaviour. After confirming the validity of the experimental paradigm it is used to evaluate the responses of An. gambiae to odours from human male and female axillary sweat incubated with 3 human axilla bacteria species. Staphylococcus epidermidis was selected for its low odour-producing pattern, Corynebacterium jeikeium for its strong Nα-acylglutamine aminoacylase activity liberating carboxylic acids including (R)/(S)-3-hydroxy-3-methylhexanoic acid (HMHA), and Staphylococcus haemolyticus for its capacity to liberate sulfur-containing compounds including (R)/(S)-3-methyl-3-sulfanylhexan-1-ol (MSH). It is demonstrated that An. gambiae is able to discriminate for the olfactometer arm conveying odour generated by incubating any of the three bacteria species with either male or female sweat. Whereas An. gambiae cannot discriminate between male and female sterile sweat samples in the olfactometer, the mosquito consistently shows a preference for male sweat over female sweat incubated with the same bacterium, independent of the species used as inoculum. Axillary sweat incubated with C. jeikeium rendered An. gambiae particularly responsive and this substrate elicited the strongest preference for male over female sweat. HMHA and MSH are suspected to be unique to human odour. It is shown that when tested on their own, neither HMHA nor MSH elicited a clear discriminating response but may affect human host approach by An. gambiae or enhance activation followed by sustained upwind flight over longer distances.