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Salas, Camillia
Résultat de la recherche
Paraître crédible. Pour une conception dynamique et interactionnelle de l’ethos à travers l’analyse du discours de procès pénaux
2024-12-06, Salas, Camillia, Herman, Thierry
L’ethos est une notion rhétorique se définissant comme l’image de soi dans le discours. Dans la conception aristotélicienne, l’ethos correspond à l’une des trois preuves dont dispose l’orateur pour susciter l’adhésion de son auditoire en faisant bonne impression au moyen de son discours, afin de paraître comme une personne honnête, prudente et bienveillante. L’ethos est abordé ici selon une conception élargie de la notion aristotélicienne dans une perspective en analyse du discours et est envisagé selon différentes composantes (identitaire, interactionnelle et une composante liée à la crédibilité de la source et du message). Ma recherche concerne l’analyse de l’ethos dans le cadre de procès pénaux au sein d’un tribunal cantonal de première instance en Suisse (arrondissement de Lausanne, Canton de Vaud) et place le prévenu et le témoin au centre de l’analyse. Le procès pénal est, en effet, un terrain propice à l’analyse de l’ethos, car l’évaluation des propos d’autrui y est prégnante et l’ethos est souvent l’objet du discours. Ma question de recherche consiste à voir comment l’ethos des prévenus et des témoins est co-construit au cours des interrogatoires, au sens où ces répondants sont amenés à retravailler l’image qu’ils projettent selon la perception de leur crédibilité par le questionneur. Mon objectif est (i) de proposer un schéma détaillé de ce processus de co-construction sur un plan discursif et cognitif. En outre, dans un contexte où l’image de soi est souvent discutée et remise en question, (ii) je m’interroge sur l’existence de marqueurs langagiers spécifiques à l’ethos. Le processus de co-construction de l’ethos montre que la perception des questionneurs repose aussi bien sur leurs représentations éthotiques préalables que sur l’évaluation explicite ou implicite de l’image projetée par les prévenus ou les témoins. Le déploiement ou le retravail de l’ethos est difficile à réaliser pour les prévenus ou les témoins, en raison de la relation dissymétrique entre les participants au procès qui entraîne une plus grande menace pour leurs faces et impacte leur degré de coopération au cours de leurs échanges avec les questionneurs. Pour tester l’hypothèse de l’existence de marqueurs éthotiques, une grille heuristique a été élaborée en amont à l’analyse afin de répertorier les différentes marques langagières potentiellement en lien avec l’image de soi. En confrontant ces inscriptions langagières au corpus, l’analyse a permis de préciser qu’il n’existe pas de marqueurs langagiers spécifiques à l’ethos. Mais il a été possible d’identifier des marqueurs langagiers privilégiés dans l’emploi de stratégies de (non)-coopération, de (non)-crédibilisation ou encore de (non)-préservation de la face, qui sont fortement rattachées à l’ethos dans sa conception élargie.