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Henry, Philippe
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Henry, Philippe
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Professeur honoraire
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philippe.henry@unine.ch
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- PublicationAccès libreLa Suisse coloniale ? : les représentations de l'Afrique et des Africains en Suisse au temps des colonies (1880-1939)Affirmer que la Suisse est coloniale ne se mesure pas seulement dans l’étude des mouvements migratoires, dans l’analyse des flux économiques et dans la recherche sur les traces laissées par de nombreux Suisses dans les pays colonisés. La population suisse a partagé une opinion communément admise de domination et un esprit de supériorité par rapport aux pays et aux peuples colonisés. L’analyse des supports populaires devient indispensable et nécessite de dépasser le cadre strict du champ politique et des courants historiographiques traditionnels. Au coeur des représentations des Africains en Suisse, la nudité, la beauté, la force physique, les pratiques corporelles, les moeurs sexuelles, les vêtements, les modes de vie sociaux et culturels sont des indicateurs usuels de la différence. Comprendre le passé colonial suisse implique donc, pour celui qui l’analyse, de modifier profondément son regard. Si la Suisse est coloniale, c’est qu’elle possède une mentalité coloniale qu’elle alimente de façon autonome, en recourant aux divers supports que le discours colonial produit. Pour qualifier l’attitude coloniale des Suisses, il convient donc de changer d’optique. On ne peut véritablement comprendre l’expression de la «chose coloniale» en Suisse en faisant l’économie d’une étude complète de l’imaginaire et des représentations mentales. Les véritables mécanismes de la Suisse coloniale sont visibles lorsque des séries sont établies entre les différentes sources comprises entre 1870 à 1939, c’est-à -dire à l’acmé des impérialismes. Le paradigme qui consiste à affirmer que sans conquête, le colonialisme n’existe pas — pas même dans les esprits —, laisse planer un sérieux doute : comment expliquer dans ce cas l’étonnante présence de documents et desupports stigmatisant l’Africain, alors que la Suisse n’a jamais possédé de colonies ni de territoires extra-européens ? Les sources iconographiques et textuelles prouvent qu’il est faux de penser que la Suisse échappe à l’esprit colonial dominant. Le fait colonial est un excellent moyen de comprendre les rapports des Suisses au monde et de saisir la façon dont le citoyen helvétique perçoit l’altérité. Au-delà du fait colonial, les stéréotypes dévolus aux Africains dépassent les strictes limites de la discrimination raciale, de la hiérarchisation des races et de la catégorisation des sociétés. Le concept de colonialité de la Suisse mérite amplement sa place dans le champ de l’histoire culturelle suisse.