Déstigmatisation et (ré)affirmation des distinctions entre hôtes, bénévoles et salarié·e·x·s. : ethnographie des relations interacteur·rice·x·s au sein d’un lieu d’aide sociale d’urgence caritatif et œcuménique de Suisse

Ce mémoire propose une ethnographie des relations entre hôtes, bénévoles et salarié·e·x·s au sein de deux associations actives dans l’espace de Solidaria, un projet œcuménique et caritatif d’une ville d’un canton suisse. Ce lieu s’inscrit dans une longue histoire d’engagement des communautés religieuses dans le domaine de la lutte contre la pauvreté. En proposant diverses prestations matérielles (nourriture, douche, lessive, permanence médicale) et immatérielles (écoute, ateliers créatifs, accompagnement spirituel, permanence juridique) à toute personne en ayant besoin, il s’ancre également dans le réseau local d’aide sociale d’urgence. À l’intérieur de cet espace, dans lequel travail social et religion cohabitent, transparaît une certaine porosité au niveau des délimitations des rôles et des groupes d’acteur·rice·x·s qui m’a conduit à explorer les manières dont elles sont brouillées mais aussi réaffirmées dans les discours et les pratiques. Dans un premier temps, j’analyse comment les distinctions entre les acteur·rice·x·s sont renégociées par le biais d’une démarche de déstigmatisation menée par l’équipe salariée. Cette dynamique, contribuant à effacer momentanément les frontières de ces catégories, m’amène, dans un deuxième temps, à appréhender les façons dont les personnes travaillant quotidiennement dans cet espace tendent à réaffirmer en parallèle, à plusieurs niveaux et en mobilisant différents marqueurs, les distinctions entre hôtes, bénévoles et salarié·e·x·s. Ce travail, en adoptant une perspective critique de l’humanitarisme et du care, met ainsi en exergue les enjeux et tensions sous-jacents aux initiatives solidaires d’inspiration religieuse guidées par une logique humanitaire et collaborant avec des professionnel·le·x·s du travail social.

This Master thesis presents an ethnography of the relationships between hosts, volunteers, and employees within two associations operating in Solidaria, an ecumenical and charitable project in a Swiss canton's town. This place is part of a long history of religious communities' commitment in the fight against poverty. By offering various material services (food, showers, laundry, medical care) and immaterial services (listening, creative workshops, spiritual support, legal assistance) to anyone in need, it is also part of the local emergency social assistance network. Within this space where social work and religion coexist, a form of permeability in terms of roles and groups of actors is apparent, which brought me to explore the ways in which the boundaries distinguishing them are blurred, but also reaffirmed in discourse and practice. First, I analyse how the distinctions between actors are renegotiated through a destigmatisation process driven by the employee team. This dynamic, contributing to the temporary erasure of the boundaries between these categories, leads me, in a second step, to understand how people working daily in this space tend to simultaneously reaffirm, at several levels and by mobilising different markers, the distinctions between hosts, volunteers, and employees. By adopting a critical perspective on humanitarianism and care, I highlight in this research the issues and tensions underlying religion-based solidarity initiatives guided by a humanitarian logic and collaborating with social work professionals.