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    Top-down and bottom-up plant-mediated interactions on wild Lima bean, "Phaseolus lunatus"
    (Neuchâtel, 2019)
    Les plantes sont attaquées par de nombreux herbivores, qui sont à leur tour attaqués par leurs ennemis naturels (parasitoïdes). Les plantes constituent la base des interactions trophiques, et leurs traits affectent les niveaux trophiques supérieurs de plusieurs manières. Ces effets sont nommés « bottom - up effects ». Dans un autre scénario, les niveaux trophiques supérieurs, tels que les herbivores et leurs ennemis naturels peuvent aussi affecter les niveaux trophiques inférieurs (« top - down effects »). Durant ma thèse, j’ai cherché à mieux comprendre les interactions complexes entre niveaux trophiques comprenant plusieurs insectes appartenant à des groupes distincts et se nourrissant de différents organes de plantes. J’ai examiné dans quelle mesure les acteurs de ces interactions trophiques à trois niveaux peuvent s’influencer entre eux, ou influencer d’autres insectes de cette même communauté.
    Le haricot de Lima (Phaseolus lunatus) est utilisé comme une plante modèle en écologie chimique. Cette plante a été domestiquée pour la consommation de ses graines, ce qui a mené à de nombreux changements physiques et chimiques de cet organe. De tels changements peuvent altérer les interactions avec les insectes qui attaquent ces graines. Dans le premier chapitre de ma thèse, je me suis intéressé aux effets de la domestication du haricot de Lima sur un des principaux ravageurs de graines stockées, la bruche Zabrotes subfasciatus. En particulier, je me suis concentré sur l’augmentation de la taille des graines, une des conséquences majeures de la domestication, et sur l’impact de ce changement sur la compétition intra spécifique des bruches. J’ai trouvé qu’en raison du procédé de domestication, les graines domestiquées conviennent mieux aux bruches. Le nombre d’œufs initialement pondus sur les graines était négativement corrélé avec le poids des bruches femelles sortis des graines, mais uniquement pour les graines sauvages. Mieux comprendre les changements de la domestication des plantes et leurs effets sur les interactions avec les insectes pourrait contribuer au développement de nouvelles stratégies de contrôle des ravageurs.
    Les graines de haricot de Lima sauvages ne sont pas comestibles pour la consommation humaine, principalement parce qu’elles contiennent des composés toxiques de défense en grande concentration: les glycosides cyanogènes (CNGs). Dans le second chapitre de ma thèse, j’ai étudié ces composés secondaires qui ont principalement fait l’objet de recherche au niveau des feuilles, où il a été démontré qu’ils sont toxiques pour plusieurs herbivores généralistes. Cependant, une étude a testé les effets de ces composés chimiques présents dans les graines sur les bruches Z. subfasciatus, et n’a trouvé aucun effet négatif. J’ai donc cherché à comprendre le rôle de ces composés chimiques dans les graines, afin de déterminer s’ils pouvaient servir à la croissance de la plante, ou bien à la défense de la plante qui vient de germer. Je n’ai trouvé aucune corrélation entre la croissance de la jeune pousse et la concentration en CNGs dans les graines. En revanche, j’ai pu démontrer que les jeunes pousses issues d’une graine contenant plus de CNGs contenaient également plus de CNGs.
    Le troisième chapitre de ma thèse porte sur l’étude d’une interaction tritrophique. L’effet des parasitoïdes sur la plante (top - down) est généralement étudié pour la réduction potentielle de dégâts fait à la plante. Cependant, il est de plus en plus reconnu que les parasitoïdes peuvent avoir d’autres effets sur les plantes, au travers des changements physiologiques provoqués dans leurs hôtes. Ces types d’interactions « top - down » sont presque inexplorées. Dans ce chapitre, j’ai étudié, lors d’un travail de terrain, les effets des parasitoïdes sur la croissance des plantes de haricot. J’ai trouvé que la réponse de croissance de la plante contre les herbivores était atténuée par la présence de parasitoïdes. De plus, les parasitoïdes ont réduit le délai de production des graines induit par les herbivores. Ces résultats sont parmi les premiers à montrer que les parasitoïdes peuvent influencer la croissance d’une plante à travers leur hôte.
    Lors des chapitres précédents, j’ai étudié différents effets « bottom - up » et « top - down » agissant dans les interactions tritrophiques. De récentes études suggèrent que différents herbivores interagissant avec une même plante, même de façon non concomitante, peuvent s’influencer au travers des changements induits dans cette plante. Cependant, cette notion reste peu étudiée. Dans le quatrième chapitre de ma thèse, je me suis intéressé aux forces de type « top - down » présentes dans les interactions tritrophiques qui ont lieu à la fin de la saison, lorsque les haricots sauvages produisent leurs graines. Les bruches qui attaquent et se développent dans ces graines peuvent être attaqués par des parasitoïdes. J’ai observé que les graines endommagées sont toujours capables de germer. J’ai donc étudié l’effet des bruches et de leurs parasitoïdes sur les plantes issues de graines endommagées. J’ai trouvé un effet négatif des bruches sur les pousses de haricot et que celui-ci est grandement atténué par la présence de parasitoïdes. De plus, j’ai démontré que ces effets négatifs sur les plantes issues des graines endommagées pouvaient affecter les insectes herbivores se nourrissant de ces plantes, en raison de changements dans les composés chimiques.
    Dans le dernier chapitre, je me suis concentré sur les interactions tritrophiques au niveau des graines de haricots sauvages, dans le but d’étudier l’impact de la densité de larves de bruches dans la graine et de la présence de parasitoïdes. L’effet de la densité des hôtes sur les parasitoïdes a déjà été étudiée dans le contexte de la réponse fonctionnelle, mais peu d’attention a été portée sur l’effet per capita de la densité des hôtes sur les parasitoïdes. De plus, les effets indirects des parasitoïdes sur leurs hôtes ne menant pas à la mort de ces derniers (effets « non - consumptive ») ont été très peu étudiés. L’augmentation du nombre de bruches par graine a eu un effet négatif sur leur poids, probablement par compétition, ainsi que sur leur taux de parasitisme. De plus, les parasitoïdes ont influencé la vitesse de développement des bruches, ce qui peut être expliqué par des effets « non - consumptive ».
    Globalement, les différents chapitres de ma thèse participent à l’amélioration de la compréhension des interactions médiées par les plantes à différents niveaux trophiques et avec différentes guildes d’insectes influençant l’évolution et l’écologie des acteurs de cette communauté et des autres insectes associés aux plantes de haricot de Lima. De futures études devraient s’intéresser aux mécanismes cachés des effets des parasitoïdes sur les plantes qui sont médiés par leurs hôtes, un sujet particulièrement peu étudié.
    Summary
    Plants are attacked by a wide array of insect herbivores, which are in turn attacked by natural enemies. Plants represent the base of these tritrophic interactions, and their traits affect higher trophic levels in many different ways. These effects have been referred to as bottom-up effects. Alternatively, higher trophic levels such as herbivores and their natural enemies can also affect lower trophic levels, this is known as top-down effects. In this thesis, I investigated the complex interactions among different trophic levels comprising several insects from different guilds that feed on various plants organs. I examined the extent to which the actors of such tritrophic interactions can influence each other, as well as other insects in the community.
    Lima bean (Phaseolus lunatus) is used as a model system in chemical ecology. This plant has been domesticated for the consumption of its seed, leading to many chemical and physical changes in this organ. Such changes can alter the interactions with the insects that attack these seeds. In the first chapter of my thesis, I investigated the effect of Lima bean domestication on one of its main storage pest, the seed beetle Zabrotes subfasciatus. Particularly, I focused on the increase of seed size, one of the major effects of domestication, and its impact on the intraspecific competition of this pest insect. I found that as a result of the domestication process, Lima bean seeds were more suitable for the seed beetle. The initial number of eggs on a seed and the weight of female beetles that emerged were negatively correlated, but only for wild seeds. Unravelling the changes in plant insect interactions caused by plant domestication may contribute to the development of pest control strategies.
    Seeds of wild lima bean plants are not suitable for human consumption, mainly because they contain toxic defensive compounds in high concentration: cyanogenic glycosides (CNGs). In the second chapter, I examined these secondary compounds that have been mainly studied in the leaves of wild lima bean, and have been shown to be toxic to generalist insect herbivores as well as some mammals. However, a previous study tested the effect of these compounds present in the seeds on seed beetles (Z. subfasciatus), and found no correlation between the performance of this insect and the seed CNG concentration. I investigated the potential role of CNG compounds in the seed of wild Lima bean as seedling resistance to herbivore as well as nitrogen storage compounds for plant growth. I found no correlation between seed CNG content and germination rate and seedling growth, but I showed that seeds with high CNG content produced seedling with a higher CNG content.
    Chapter three consists on a study on tritrophic interactions. The effect of parasitoids on the plant (topdown) is generally investigated for the potential reduction in herbivory damage they can cause. However, it is increasingly recognized that parasitoids can have other effects on plant, through physiological changes in their host. These types of top-down effect of parasitoids on plant are virtually unexplored. Here, I explored the effect of parasitoid on plant growth. In a field experiment, wild lima bean plants were exposed to three treatments. In the first one, no herbivores were allowed to feed on the plant. In a second one, plants were attacked by an herbivorous caterpillar, Spodoptera latifascia, which is naturally present in the same areas as our study plant. Third, some plants were also attacked by herbivores, but in presence of an ectoparasitoid (Euplectrus platyhypenae), present in the same area. I found that the herbivores triggered an overcompensation of the plant growth, which was attenuated by parasitoid presence. In addition, parasitoids could reduce the delay in seed production induced by herbivory. These interesting results are among the first to show that parasitoids can influence plant growth through its host.
    In the previous chapters, I focused on the separate effects of bottom-up and top-down forces on tritrophic interactions. Recent findings suggest herbivores present on the same plant at different times can influence each other through changes induced in the plant. Yet, this notion remains understudied. In the fourth chapter, I investigated top-down forces in a tritrophic interaction taking place at the end of the season, when wild lima bean plants are producing seeds. One of the main seed predators of seeds of wild Lima bean plants is the bruchid beetle Z. subfasciatus, which is in turn parasitized by the braconid ectoparasitoid Stenocorse bruchivora. I observed that seeds that had been previously damaged by seed beetles were still able to germinate. Thus, I designed a series of experiments to test the effect of bruchid beetles and their parasitoids on the germination and performance of the seedlings. I found a negative effect of bruchid beetles the germinated seedling performance, which was strongly attenuated by parasitoids. Furthermore, I also tested the bottom-up consequences of seed infestation on subsequent herbivorous insect feeding on plants germinated from seeds that endured different intensity and type of insect damage. I showed that plants produced by seeds with high levels of insect damage are less defended and leaf herbivores perform better on them than plants produced by seeds with low damage or no damage.
    In the last chapter of my thesis, I focused on a tritrophic interaction at the seed level, in order to investigate the interactive effects of beetle larval density inside the seed and the presence of parasitoids on bruchid development. Herbivore density has already been shown to influence parasitoid density, without changing the interaction between herbivores and parasitoids. However, the extent to which herbivore density influences the per capita effects of parasitoids on their host remains understudied. In addition, direct effects of parasitoids on their host (parasitism) are well studied, but there are only a few studies that investigate indirect non-consumptive effects of parasitoids on their host (e.g. induction of host defensive behavior by parasitoid sole presence). To study these interactions, we used a tritrophic interaction taking place at the wild lima bean seed level, between a seed beetle (Z. subfasciatus) and its parasitoids (S. bruchivora). This system is ideal because females of Z. subfasciatus glue their eggs on the seed coat and larval development is confined inside a small seed. This allows the manipulation of beetle larval densities in the seeds by removing eggs from the seed coat. The increase in beetle density had a negative effect on beetle performance, certainly due to intraspecific competition. This cascaded up to parasitoids which parasitism rate was significantly reduced. Parasitoids altered beetle development time, which can be explained by parasitoid nonconsumptive effects on their host.
    Together, the chapters of the current thesis add to the growing body of knowledge on how plantmediated interactions on different trophic levels and insect guilds affect the ecology and evolution of each of its participants and ultimately the insect community associated with Lima bean plants. Future studies should aim at shedding more light on the mechanisms that underlie herbivore-mediated parasitoids effects on plants, a topic that is particularly understudied.