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    Living the prison: An ethnographic study of indefinite incarceration in Switzerland
    (2020) ; ;
    Hostettler, Ueli
    Dans la première moitié du XXe siècle, la réhabilitation était le principal paradigme de la politique criminelle en Suisse, à l'instar de la plupart des pays dits occidentaux. Cependant, l'évolution des exigences en matière de sécurité et la pression exercée par l'opinion publique au cours des dernières décennies ont contribué à faire développer une approche plus punitive. Ce « tournant punitif » de la politique criminelle va de pair avec une augmentation des investissements dans la sécurité, la répression et le contrôle. En conséquence, la Suisse compte aujourd'hui davantage de personnes qui purgent des peines plus longues ou qui sont condamnées à une mesure thérapeutique de « traitement des troubles mentaux » (art. 59 du code pénal suisse [CP]) pour une durée indéterminée. En outre, actuellement les personnes condamnées à l' « internement » (art. 64 CP) ne sont quasi plus libérées. Bien que le nombre de détenus de longue durée augmente, ce que nous savons actuellement de l'emprisonnement à durée indéterminée et du vécu des personnes concernées provient principalement d'expert·e·s juridiques ou d'une couverture médiatique indifférenciée. Ces sources incluent rarement le point de vue des détenus ou du personnel pénitentiaire. Dans les sciences sociales depuis les années 1980 les recherches ethnographiques ont diminué dans la plupart des pays dits occidentaux. Malgré un récent renouveau de l'ethnographie carcérale, les études contemporaines sur les prisons sont fondées sur des méthodes quantitatives, utilisant souvent des sources et des données officielles. Basée sur des données ethnographiques générées dans le cadre d'une enquête de terrain de longue durée dans deux établissements pénitentiaires fermées concentrant des hommes détenus, cette thèse donne un aperçu inédit de la vie quotidienne des prisonniers incarcérés pour une durée indéterminée (probablement à vie) car étiquetés comme « dangereux » et catégorisés comme présentant un « risque indu » pour la société. Combinant une approche phénoménologique et pragmatique, cette thèse explore les perceptions subjectives des détenus des différents contextes quotidiens de la prison (dans la cellule, au travail, pendent les loisirs). Elle rend aussi compte de leurs multiples techniques de « faire avec » l'espace et le temps et met ainsi en lumière leur divers manière d'habiter la prison. Fournissant des connaissances sur la politique pénale actuelle ainsi que sur les règles institutionnelles, normes et pratiques des autorités et du personnel de la prison, elle prend également en considération le fonctionnement du système carcéral., During the first half of the 20th century, rehabilitation served as the main paradigm for criminal policy in Switzerland, as in most so-called Western countries. However, changing demands for security and public pressure over the past decades have led to a shift towards a more punitive and hard-line approach to crime. This ‘punitive turn’ in criminal policy has produced more investment in security, repression, and control. As a consequence, in Switzerland there are now more people serving longer sentences or sentenced to in-patient therapeutic ‘treatment of mental disorders’ (Art. 59 Swiss Criminal Code [SCC]) for an undetermined duration. Those sentenced to ‘indefinite incarceration’ (Art. 64 SCC) are rarely released. Although the number of long- term inmates is increasing, what we currently know about indefinite imprisonment – what it is and what it does – mainly derives from legal experts or undifferentiated media coverage, and rarely includes the point of view of prisoners or staff. In the social sciences since the 1980s, ethnographic research that is able to reveal the individual experiences of imprisonment has declined in most so-called Western countries. Despite a recent revival of prison ethnography, contemporary prison studies mainly have a quantitative focus, often using official sources and data. Based on ethnographic data generated in two secure prisons housing male offenders, this thesis provides insights into the overlooked everyday lives of long-term prisoners in Switzerland, who are labelled as ‘dangerous’ and categorized as posing an ‘undue risk’ to society and therefore held in (probably) lifelong detention. Through a phenomenological and pragmatist approach, it explores prisoners’ subjective, emplaced, and embodied perceptions of the prison’s various everyday contexts (in the cell, at work, during leisure time), and the forms of agency they express through their multiple methods of dealing with space and time, thereby uncovering prisoners’ manifold ways of inhabiting the prison. It also takes into consideration the functioning of the institution by providing knowledge of current penal policies, institutional rules, and norms and practices developed and followed by prison authorities and staff.
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    Politiques de la tradition. Le patrimoine culturel immatériel
    (Lausanne: PPUR, 2018) ;
    Leimgruber, Walter
    ;
    Graezer Bideau, Florence
    ;
    Depuis quelques années, une nouveau concept circule sur les scènes culturelles suisse et internationale : le patrimoine culturel immatériel. Ce concept regroupe des activités telles que musiques et danses traditionnelles, rites et rituels, savoir-faire artisanaux et connaissances populaires. En adhérant, en 2008, à la Convention de l’UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, la Suisse s’est engagée à en faire l’inventaire sur son territoire, sous la forme d’une « Liste des traditions vivantes ». Cet ouvrage saisit l’occasion des dix ans de cette adhésion pour faire le point sur le sens et les effets de ce nouveau dispositif patrimonial. Le patrimoine immatériel représente un facteur de cohésion sociale et d’ancrage identitaire crucial pour toute collectivité. S’engager à le sauvegarder, c’est fournir l’occasion d’honorer le passé, mais aussi de débattre de l’avenir. Que voulons-nous garder des pratiques et croyances de nos aïeules ? La réponse à cette question passe nécessairement par une réflexion de fond sur les politiques de la tradition, en Suisse et sur la scène internationale.
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    La gestion durable des sols agricoles: sécuriser les démarches ou légitimer les controverses ? L’exemple des politiques agroenvironnementales autour de l’érosion hydrique des sols arables en Suisse
    Cette recherche interdisciplinaire (sciences naturelles – sciences politiques et sociales) porte sur la thématique de la gestion durable des sols agricoles. Plus spécifiquement, elle s’est focalisée sur les politiques environnementales et agricoles suisses autour de la protection qualitative des sols et de la lutte contre de l’érosion hydrique des sols arables. L’étude a abouti à une question adressée aux experts scientifiques et administratifs, et vise une réflexion sur les approches dominantes de la protection des sols en Suisse et à l’échelle globale : face aux constats d’échec des politiques agroenvironnementales, faut- il continuer comme le soutien l’ONU et la FAO à persévérer dans une unique stratégie de « sécurisation » de l’environnement et des sols, synonyme d’innovations techniques qu’il faut parvenir à faire appliquer, ou faut-il plutôt miser sur le développement de nouveaux espaces de débats et de processus décisionnels sur la base d’innovations sociales et politiques ? La révolution industrielle et agricole des 19e et 20e siècles a bouleversé la société européenne et le monde agricole. Cela a conduit notamment à une intensification et à une rationalisation des pratiques agricoles et de l’aménagement de l’espace rural, causes les plus évidentes de la dégradation des sols. Ce constat émis par les scientifiques des sols a alerté l’ONU dès les années 1950 qui y a vu un enjeu capital pour la sécurité alimentaire mondiale. Avec les experts scientifiques comme alliés, cette organisation a développé au début des années 2000 des cadres d’analyses autour des concepts de services écosystémiques ou d’intensification durable de la production agricole, ainsi que des lignes d’action qui ont très fortement influencé les recherches en sciences environnementales et les programmes des administrations étatiques occidentales. En Suisse, les experts des sols ont tiré la sonnette d’alarme dès les années 60- 70 et ont œuvré principalement à travers la Société suisse de pédologie (SSP) pour que le problème de la destruction et de la dégradation des sols soit cadré dans des bases légales. Pionnières en la matière, les autorités suisses ont inscrit la conservation à long terme de la fertilité des sols dès 1983 dans la Loi sur la protection de l’environnement (LPE), puis la gestion durable des ressources durant les années 1990 dans la Loi sur l’agriculture (LAgr). Durant la dernière décennie, sous l’impulsion de la FAO et de l’International technical panel on soils (ITPS), l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) a soutenu un changement de paradigme de la protection des sols orienté notamment sur un couplage des pratiques agricoles durables et des fonctions des sols : le function-based decision making. Après 20 ans de mise en œuvre de la LPE-OSol 98 et de la LAgr-OPD 98, le constat demeure mitigé en matière de dégradation des sols. D’un côté il est raisonnable d’affirmer que sans ces instruments, l’état de fertilité (selon la définition de l’OSol) des sols serait pire aujourd’hui. De l’autre, la dégradation et de l’érosion se poursuivent à des degrés très divers. L’OFEV et l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG) s’accordent à dire dans un rapport, dix-huit ans après l’entrée en vigueur des textes de loi, que les objectifs agroenvironnementaux n’ont pas été atteints. Ces instruments d’action publique, construits par les experts scientifiques et politico-administratifs, les acteurs du monde agricole et les élus politiques, n’ont pas généré les effets escomptés. Cette étude a donc cherché à comprendre pourquoi, en s’intéressant au problème de l’érosion, vécu sur le terrain notamment par les agriculteurs, les conseillers agricoles, ou les employés des administrations cantonales, et décrit par la recherche scientifique et les rapports nationaux et internationaux. Elle s’est également penchée sur la manière dont les scientifiques ont abordé ce problème et les limites de leur expertise. Finalement, elle a analysé comment les bases légales définissent le problème, comment elles ont été construites, mises en œuvre et évaluées. Au final, 67 entretiens et 15 observations ont été effectués, et une centaine d’articles et de rapports ont été parcourus. Cette enquête ethnographique aboutit au constat que l’érosion des sols agricoles n’est pas qu’un problème écologique et agronomique, mais un problème socio- environnemental comportant des dimensions économiques, sociales, administratives, politiques et culturelles. Pourtant les porte-paroles et le cadrage historique dominant légitimé tant au niveau international que national est celui des sciences environnementales et techniques qui ont avant tout considéré le problème de la dégradation des sols cultivés sous l’angle des effets sur la productivité agricole et de la prévention des risques (notamment érosif), et dont l’approche principale vise aujourd’hui à développer des modèles numériques et des innovations techniques qu’il faut parvenir à transférer aux destinataires de ces mesures. Cette expertise scientifico-technique qui s’affiche pourtant publiquement comme voulant être rationnelle et efficace est, face à l’étude et à la gestion des problèmes environnementaux, pétrie d’incertitudes, de controverses et de manque d’effectivité chronique de mise en œuvre. Dans le cas de l’érosion et de la dégradation des sols, les scientifiques eux-mêmes s’accordent à dire qu’ils ne sont pas parvenus à répondre aux questions fondamentales de leur discipline. En Suisse, les entretiens avec les divers acteurs impliqués révèlent qu’il demeure des zones d’ombre majeures de l’expertise scientifique autour de l’érosion hydrique des sols agricoles : l’apport des réflexions et des connaissances en sciences sociales et politiques ; des énoncés scientifiques socio-économiques concrets sur les impacts de la libéralisation des marchés sur les pratiques agricoles et sur l’état de l’environnement ; des énoncés scientifiques concrets sur les effets du développement territorial et des améliorations foncières sur la dégradation et l’érosion des sols. Face aux limites bien normales de cette seule forme d’expertise, ces mêmes groupes d’experts préconisent malgré tout à l’avenir, la production de données visant à alimenter des modèles toujours plus précis pour offrir aux décideurs des administrations des mesures de lutte (ou des pratiques agricoles) toujours plus ciblées. Mais des voix s’élèvent dans la communauté scientifique, affirmant qu’une telle approche conduit à un confinement toujours plus grand des scientifiques dans leur laboratoire, qu’elle ne pourra jamais contrôler toutes les incertitudes, qu’elle consolide le statut dominant des scientifiques « durs » et des ingénieurs sur les problèmes environnementaux dans les arènes politico- administratives, et qu’elle écarte largement d’autres types d’expertise profane ou scientifique en amont des processus décisionnels. Ce rôle central (nécessaire et important) des experts techniques travaillant dans les cantons, la confédération et les instituts de recherche tel Agroscope en tant que porte-parole et entrepreneur de causes s’est vérifié tout au long de l’histoire de la protection des sols. Ce rôle ne doit ni être minimisé ni être perçu rétroactivement de manière négative. Ce sont grâce à ces acteurs agissant dans ces scènes discrètes que des bases légales ont vu le jour. Mais la dégradation et l’érosion sont restées des problèmes d’experts. Ils ne sont jamais devenus des problèmes appropriés par d’autres acteurs de la société civile. En outre, le processus de construction des politiques agroenvironnementales a été marqué par des mécanismes de filtrage de l’expertise scientifico-technique conduisant à des incohérences importantes dans les bases légales. Citons en exemple la séparation entre la protection quantitative (surfaces) et qualitative (fertilité) du sol, l’absence du rôle des améliorations foncières dans les bases légales, l’absence de politique cohérente de la gestion de la matière organique (humus), l’absence de lignes d’action autour des dégâts off-site de l’érosion, des valeurs indicatives pour l’érosion scientifiquement incorrectes, etc. La mise en œuvre de la LPE-OSol et de la LAgr-OPD est également lacunaire. Cela est dû au manque de ressources humaines, financières, politiques et cognitives d’appliquer en particulier dans les services de l’environnement, et à des résistances et des blocages chroniques aux mesures de gestion durable ou aux instruments de contrôles de l’érosion. En bref, les consensus trouvés après de longues négociations sont sans cesse remis en cause. Finalement, les évaluations officielles de la Confédération reposent sur des critères mettant en avant les taux de participation ou le manque de données biogéographiques et techniques. Or, une telle posture des autorités peut être interprétée comme une façon de légitimer les politiques et les budgets agroenvironnementaux en vigueur. Sous cet angle d’analyse, les dimensions techniques sont instrumentalisées au sein des arènes politiques. Ce problème environnemental n’est donc pas tant technique, mais politique et démocratique. L’inégalité des ressources d’action entre les milieux environnementaux et agricoles, ainsi que l’influence des lobbys et des grands distributeurs pèse lourd sur ces enjeux et s’exprime à travers l’ensemble des processus décisionnels au sein du cycle des politiques publiques (mise à l’agenda, programmation, mise en œuvre, évaluation). Or, la technicisation des débats politico-administratifs et des rapports de la Confédération dépolitise systématiquement les questions et les objectifs fondamentaux des politiques agroenvironnementales : par exemple en discutant ad aeternam des moyens techniques pour contrôler l’érosion, pour finalement aboutir à des consensus qui sont remis en cause dès leur application. Voilà pourquoi dans cette étude, l’auteur a souhaité se détourner de cette focalisation sur les agriculteurs « coupables » et « à convaincre » en le portant sur le rôle des sciences, de l’État et du fonctionnement de notre démocratie. Il a plutôt cherché à remettre en question l’approche dominante de la protection des sols dans le monde sans vouloir la décrédibiliser, mais en l’incitant à davantage de réflexivité et à s’ouvrir aux autres sciences et formes de connaissances. Il use dans ce travail engagé de la liberté de parole d’un doctorant universitaire en ethnologie pour fournir une étude atypique et exploratoire. En conclusion, cette recherche plaide pour favoriser l’émergence de nouveaux porte-paroles légitimés des sols : des artistes, des agriculteurs, des jardiniers amateurs, des paysagistes, des sociologues, des philosophes, des historiens, etc. Elle soutient la création de panels d’experts pluridisciplinaires, p. ex. au sein de la Société suisse de pédologie (SSP), et la mise en place de nouveaux espaces de discussions publics et/ou confidentiels, p. ex. en mobilisant la convention d’Arhus sur le principe de participation. Finalement, cette étude encourage une meilleure formation de terrain sur les «  sols » au sein des universités, des hautes écoles et des écoles d’agricultures. Techniciser les débats et dépolitiser les enjeux a été une stratégie gagnante des acteurs de la SSP et politico-administratifs pour amener des bases légales et construire des instruments en évitant tout débordement politique qui auraient causé instantanément des blocages. Mais 30 ans plus tard, face à l’échec des politiques agroenvironnementales et face à l’énorme déséquilibre des ressources d’action entre les milieux environnementaux et les milieux agricoles, cette approche a montré qu’elle ne peut plus avancer seule. À terme, seule une réforme des processus décisionnels démocratiques visant à créer de nouveaux espaces de controverses scientifiques et politiques, ainsi qu’une légitimation de nouvelles formes d’expertise semblent pouvoir conduire à une remise en question des priorités politiques et à une redistribution des rapports de forces. Les débats fondamentaux sur les causes structurelles de la dégradation de l’environnement, sur la cohérence des politiques agroenvironnementales, et sur les objectifs à définir et à atteindre, ne doivent plus être tenus entre quelques experts techniques aux pauses café, mais bien trouver leur place dans de nouvelles arènes de discussion publiques, politiques et administratives., This interdisciplinary dissertation (combining natural, political and social sciences) focuses on the sustainable management of agricultural soils. More specifically, it tackles Swiss environmental and agricultural policies for qualitative soil protection and the accompanying measures to limit water erosion of arable lands. Aiming to launch sustained debate and reflection about the dominant approaches to soil protection in Switzerland and at the global level, it asks scientific and administrative experts the following question: given the failures of agri-environmental policies to date, should we persevere, as the United Nations (UN) and the Food and Agriculture Organization (FAO) propose, with the single-strand strategy of environmental and soil “security”, or is it not time to focus on the development of new spaces for debate and decision- making, based on social and political innovations? The industrial and agricultural revolutions of the 19th and 20th centuries have deeply transformed European society and the agricultural world. This has led to an intensification and rationalization of agricultural practices and zoning in rural areas, the most obvious causes of land degradation. Warnings by soil scientists have alarmed the UN since the 1950s, and led to the identification of world food security as a pressing issue. At the beginning of the 2000s, with scientific experts as allies, this organization developed analytical frameworks around the concepts of “ecosystem services” and “sustainable intensification” of agricultural production, as well as guidelines that have strongly influenced the environmental sciences and policy in Euro-American countries. Soil experts working mainly through the Soil Science Society of Switzerland (SSSS) warned Swiss authorities of the problem of soil destruction and degradation in the 60s and 70s, and began investigating the legal bases for action. Pioneers in the field, Swiss authorities heeded these warnings and enshrined the long-term conservation of soil fertility in the Swiss Environmental Protection Act (EPA) as early as 1983, and the sustainable management of resources in the Agricultural Act (AgricA) during the 1990s. Over the past decade, under the leadership of the FAO and the International Technical Panel on Soils (ITPS), the Swiss Federal Office for the Environment (FOEN) undertook a paradigm shift in soil protection, focusing in particular on the coupling of sustainable agricultural practices and soil functions, promoting so- called “function-based decision making”. Today, after 20 years of implementation of the EPA-OSol 98 and the AgricA- OPD 98, observers all conclude that the results of these efforts to reduce or stop soil degradation remain disappointing. On the one hand, it is reasonable to say that without these instruments, soil fertility (as defined by OSol) would be worse today. On the other hand, degradation and erosion continue, albeit at different speeds and to different degrees. The FOEN and the Federal Office for Agriculture (FOAG) agree, eighteen years after the implementation of this legislation, that their agri-environmental objectives have not been met. These instruments of public policy, co-conceived by scientists, politico-administrative experts, spokespeople for the agricultural sector and politicians, have not generated the expected results. This present study seeks to understand why, by conducting ethnographic fieldwork and interviews with farmers, agricultural advisers, public servants in cantonal and federal administrations and scientists, and by analyzing existing national and international reports. By focusing on how these diverse actors have tackled this problem, it identifies the limits of their expertise, with a particular focus on soil scientists. Finally, it analyzes how the legal bases that define and frame the problem were constructed, implemented and evaluated. In the end, 67 interviews and 15 field observations were carried out, and about 100 articles and reports were consulted. This ethnographic survey leads to the observation that the erosion of agricultural soils is not only an ecological and agronomic problem, but also a socio-environmental problem involving economic, social, administrative, political and cultural dimensions. However, the main actors and the dominant historical framework, recognized both internationally and nationally, are all limited to the environmental and technical sciences. These “technosciences” traditionally consider the problem of cultivated soil degradation in terms of its effects on agricultural productivity and risk prevention (especially erosive risk). Their main methods involve the development of numerical models, thought to justify the direction and content of technical innovations that must then be transferred to their end-users, that is to say, farmers and agricultural advisors. However, despite their public claims to rationality and effectiveness, a careful analysis of these forms of scientific and technical expertise reveals multiple uncertainties, controversies and a systemic lack of implementation. In Switzerland, interviews carried out with the various actors involved revealed that there are still major blind spots in scientific expertise around water erosion of agricultural soils. These blind spots revolve around: knowledge in the social and political sciences; a detailed and concrete assessment of the impacts of market liberalization on agricultural practices and the environment; and detailed scientific study of the effects of zoning and land improvement on soil degradation and erosion. While acknowledging the inevitable limits of single-strand expertise, these same experts nonetheless recommend that future policy emphasize the production of yet more data aimed at feeding more and more precise models to offer decision-makers control measures for increasingly precise targeting of farmers and farming practices. More recently, a small but audible portion of the scientific community has voiced the opinion that such an approach leads to the increasing confinement of scientists within their laboratories, to the detriment of real-world solutions. These critics point out that these mono-disciplinary policy measures will never be able to control all of the uncertainties in this area, that they consolidate the dominant role of “hard” scientists and engineers in addressing environmental issues, thereby largely excluding other types of scientific of practice-based expertise from upstream decision-making processes. The central (and no doubt necessary and important) role of technical experts working in the cantons, the Swiss Confederation and research institutes such as Agroscope who function as spokespersons and moral entrepreneur for soil policy has been a constant throughout the history of this issue. This role should not be minimized or perceived negatively today. It is thanks to these experts, acting discretely but effectively behind the scenes, that Switzerland has the legal bases it needs to undertake qualitative soil protection. However, by confining the problem of the degradation and erosion of agricultural soil to expert circles, this top-down approach has made it more unlikely that these policies are appropriated by other actors in civil society, most importantly, those people who are supposed to apply them. In addition, the process of creating agri-environmental policies has been marked by filtering mechanisms central to scientific and technical expertise, leading to significant inconsistencies. Examples include the disconnect between quantitative (surface) and qualitative (fertility) soil protection measures, the lack of any mention of land improvement in the legal bases for policy-making, the lack of a coherent policy for the management of organic matter (humus), the lack of guidelines around off-site erosion damage, and scientifically incorrect indicative values for erosion, etc. As mentioned, a further problem is that the implementation of EPA-OSol and AgricA-OPD is spotty and incomplete. This is due to lack of human, financial, political and cognitive resources in environmental administrations, and to resistance and chronic inertia with respect to sustainable management measures or erosion control instruments. The analysis presented here demonstrates how points of consensus reached after long negotiations are constantly being called into question, sending confusing signals to all actors involved. Finally, the official assessments that the Confederation undertakes to evaluate the effectiveness of these policies are based on criteria that highlight participation rates or that focus single- mindedly on lack of biogeographic and technical data. Such an official attitude can be interpreted as a way of legitimizing existing agri-environmental policies and budgets, in a country where agriculture represents a highly charged political issue. From this perspective, the dissertation concludes that the technoscientific orientation of current policy serves distinct purposes within political arenas. In other words, the environmental problem of agricultural soil fertility is not so much a technical as a political and democratic problem. The unequal budgets and legitimacy as between environmental and agricultural administrations, as well as the influence of lobbies and the food industry, weigh heavily on these issues. All of these framing mechanisms can be seen through a detailed analysis of the decision-making processes within the public policy cycle (setting of the political agenda, programming, implementation, evaluation), as demonstrated here. However, through “technicization” of the politico- administrative debate, the reports of the Confederation systematically depoliticize these issues, losing sight of the fundamental objectives of agri- environmental policies. This “failure as usual” model for tackling environmental problems is particularly evident in the eternal discussions about the technical means to control erosion, which, time and again lead to fragile agreements that are challenged as soon as they are applied. Thus, farmers continue to refuse or neglect these policy measures, while experts continue to deprive themselves of the means fully to evaluate their effectiveness. For all these reasons, this dissertation takes its distance from the focus on technical fixes that seek to convince “conservative” or “ignorant” farmers to tow the line. Rather, it focuses on the role of science and the functioning of Swiss democracy. It seeks to challenge the dominant approach to soil protection around the world without discrediting it, by encouraging it to be more reflexive and open to other sciences and other forms of knowledge production. Using his academic freedom as a PhD student in anthropology, the author takes an engaged and critical, and yet informed and respectful, stance with respect to scientific expertise, hoping to provide innovative avenues for reflection in an area in urgent need of new solutions. In conclusion, this research argues in favor of the emergence of new soil spokespersons: farmers, hobby gardeners, landscapers, artists, sociologists, philosophers, historians, etc. It recommends the creation of multidisciplinary expert panels, for example within the SSSS, and the establishment of new public and/or private forums for discussion, for example by mobilizing the Aarhus Convention on the principle of participation. Finally, this study encourages better field training in soil sciences in universities, colleges and agricultural schools. Technicizing the debates and depoliticizing the issues was a winning strategy for the SSSS and politico- administrative actors in their attempts to create the legal basis for the protection of agricultural soil, by avoiding the political resistance that frank and open discussion of the stakes at hand would have encountered. However, thirty years later, faced with the failure of agri- environmental policies and the huge imbalance of resources for action as between environmental and agricultural authorities, this approach has shown that it can no longer advance alone. Ultimately, only a reform of democratic decision-making processes aimed at creating new spaces for scientific and political disagreement, as well as the legitimization of new forms of expertise, can lead to a realignment of political priorities and a redistribution of power and influence in this area. The fundamental debates on the structural causes of environmental degradation, on the coherence of Swiss agri-environmental policies, and on the objectives to be defined and to be achieved must no longer be held between technical experts over coffee breaks, but find their rightful place in new public, political and administrative arenas.
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    Les chair(e)s de transmission : apprendre, pratiquer, patrimonialiser : l’horlogerie en Suisse
    Située à la croisée de l’anthropologie des savoirs et des techniques et de l’ethnologie des patrimonialisations, cette thèse de doctorat est le fruit d’un travail d’immersion de quatre années dans le monde de l’horlogerie suisse. J’y ai étudié les dynamiques de transmission et de patrimonialisation des compétences en réalisant trois-cent entretiens avec des acteurs de la branche, des consultations de fonds documentaires ainsi que des observations au sein d’écoles techniques, d’ateliers, d’usines et lors d’événements (salons professionnels, visites d’entreprises, journées d’étude, grands prix, journées du patrimoine). Ces enquêtes de terrain m’ont permis d’explorer les manières dont le métier d’horloger était exercé et vécu au sein de différents groupes et organisations de la branche. En me focalisant sur les formes incorporées de connaissance, j’ai décrit de quelles façons les praticiens, entourés d’un nombre important d’artefacts, étaient engagés dans l’apprentissage et la pratique quotidienne de la profession mais également investis dans la mise en valeur de l’horlogerie, de ses produits, de ses acteurs, de ses territoires. Au cours des recherches, il est également apparu que le patrimoine et la transmission du savoir-faire étaient aujourd’hui des motifs récurrents dans les discours et les activités promotionnels de très nombreux collectifs (marques, organismes de tourisme, médias, institutions muséales, collectivités territoriales, etc.). Parallèlement, nombreux sont les horlogers qui, malgré cette prolifération patrimoniale, s’inquiètent de la passation de leur métier et affirment que ce dernier est en train de se perdre. L’objectif de cette thèse est donc de problématiser les rapports qu’entretiennent la transmission et la patrimonialisation. A rebours de la conception habituelle – relayée par un grand nombre d’anthropologues et de spécialistes du patrimoine – selon laquelle ces deux opérations seraient intimement liées, certains horlogers considèrent que les savoirs de métier et les techniques corporelles y afférant sont désormais en danger non pas malgré mais en vertu de l’essor pléthorique des pratiques patrimoniales. Ces formes de valorisation sont ainsi perçues de manière ambivalente et apparaissent comme ce qui favorise l’oubli de ce qu’elles prétendent pourtant pérenniser. En posant un regard sur l’actualité et l’histoire récente de l’horlogerie helvétique, le présent ouvrage est une invitation à comprendre ce qui a progressivement façonné un tel état de fait.