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    Fully-integrated hydrological modelling in steep, snow-dominated, geologically complex Alpine terrain
    (Neuchâtel, 2020)
    Les formes topographiques accidentées et les géologies complexes qui caractérisent le terrain alpin exercent généralement une forte influence sur les processus hydrologiques à l’échelle du bassin versant. Les glaciers, le manteau neigeux saisonnier, le pergélisol et les forêts font également partie intégrante des systèmes alpins, et tous réagissent autre aux changements climatiques en cours. Étant donné qu’un réseau d’interactions et de mécanismes de rétroaction relie tous les éléments du système, tout changement hydrologique résultant de la modification de la neige et de la glace pourrait être modulé par la réponse intégrés plus généralement. Pourtant, malgré cette réalité complexe, les modèles hydrologiques conceptuels de de type « boîte » – qui utilisent des représentations très simplifiées des eaux souterraines et des autres processus physiques, et qui, en outre, négligent généralement les changements contemporains des autres composantes du système – continuent à étayer la plupart des prévisions concernant la disponibilité future de l’eau dans les Alpes. La fiabilité de certaines prévisions qui en résultent peut donc être mise en doute. Il existe des codes plus sophistiqués basés sur la physique, mais ils utilisent également des représentations simples du souterrain. De plus, de nombreuses études de terrain détaillées ont été menées dans les bassins versants alpins, mais elles sont rarement allées jusqu’à la modélisation numérique.
    Dans ce contexte, la présente thèse a évalué l’utilité de l’un des modèles d’écoulement surface-souterrain entièrement intégrés les plus avancés pour simuler la dynamique hydrologique dans les bassins versants alpins abrupts, dominés par la neige et géologiquement complexes – dans les conditions actuelles et futures plausibles du climat, des forêts et du pergélisol. Les écoulements de surface sont particulièrement importants dans ce type de terrain en termes d’écologie, de risques d’inondation et de transport de sédiments, tandis que les écoulements souterrains peuvent être fortement influencés par des structures souterraines tridimensionnelles (3D) intrinsèquement complexes. En outre, des échanges bidirectionnels entre ces domaines peuvent se produire fréquemment, créant ainsi des cours d’eau éphémères dans certaines circonstances. En ayant la capacité de simuler tous ces processus d’une manière cohérente, transitoire et basée sur la physique, les codes intégrés offrent théoriquement un grand potentiel pour les applications alpines. Toutefois, leur utilisation dans les contextes montagneux s’est jusqu’à présent limitée aux bassins versants cristallins de faible perméabilité de la Cordillère Nord-Américaine.
    Le développement d’une chaîne de modèles intégrant l’évolution du manteau neigeux, l’écoulement de surface, l’écoulement souterrain à saturation variable et la dynamique de l’évapotranspiration a donc été entrepris. Le domaine spatial (superficie totale de 37 km2) était composé de deux bassins versants adjacents protégés – le Vallon de Nant et le Vallon de La Vare – qui sont situés dans la célèbre Nappe de Morcles (Alpes Suisses occidentales). Au début, très peu des données détaillées étaient disponibles bien qu’elles sont pourtant nécessaires pour alimenter un tel modèle « avide de données ». Pour remédier à cela, quatre puits de surveillance des eaux souterraines peu profondes ont été forés fin 2016 et instrumentés au printemps 2017. Les observations du niveau des eaux souterraines qui en résultent complètent les mesures météorologiques et les mesures du débit des cours d’eau fournies par les groupes de recherche collaborent. Une campagne de géophysique sur le terrain a également été entreprise afin d’établir la géométrie du principal aquifère non consolidés de la zone d’étude, situé dans un cône de déjection. Les géométries de plusieurs autres formations sédimentaires non consolidées moins accessibles contenant des aquifères ont été estimées au moyen d’une procédure géomorphométrique simple.
    À l’aide du logiciel GeoModeller, un modèle 3D précis, à haute résolution, détaillé et spatialement étendu de la géologie du substratum rocheux a été développé. Compte tenu de la complexité topographique et géologique de la région étudiée, cette tâche était loin d’être simple, mais elle était néanmoins réalisable. Cette contribution démontre que des modèles géologiques 3D présentant des caractéristiques appropriées pour des applications hydrogéologiques peuvent être développés même dans les contextes les plus complexes. En plus, le manque de ces données ne devrait pas constituer un obstacle à la progression au-delà de simples modèles hydrologiques conceptuels. Outre les géométries des aquifères non consolidés et les données sur les sols (très limitées), le modèle géologique a permis d’établir la structure souterraine du modèle d’écoulement intégré.
    Par la suite, afin de pallier l’absence de produits météorologiques tiers préexistants avec la résolution spatio-temporelle requise pour un tel terrain et de déterminer les données spatio-temporelles représentant les apports d’eau liquide dans le système aussi précisément que possible, un nouveau cadre de simulation, d’optimisation et d’incertitude de la neige à haute résolution (à l’heure, 25 m), indépendant du modèle, a été proposé. L’approche est spécifiquement adaptée à la pente de la zone d’étude et à la disponibilité limitée des données météorologiques et nivologiques in situ ; deux facteurs qui compliquent souvent le travail en terrain montagneux.
    L’approche de modélisation de la neige, basée sur le bilan énergétique et tenant compte de la redistribution gravitationnelle, va bien au-delà de celle de nombreux modèles hydrologiques, y compris des modèles avancés entièrement intégrés. Ces modèles reposent encore principalement sur des approches de modélisation de la fonte des neiges basées sur des indices, dont la capacité à reproduire de manière réaliste la dynamique de la neige en terrain alpin complexe est limitée. Plus spécifiquement, en reliant un simulateur de neige hybride (physique–statistique) basé sur le bilan énergétique, implémenté dans le code WaSiM, avec le logiciel d’estimation automatique des paramètres et d’estimation de l’incertitude PEST, deux types complémentaires d’observations de la neige – à savoir les cartes d’étendue de neige et les séries chronologiques d’équivalent en eau de la neige – ont contribué à l’estimation de plusieurs paramètres importants.
    Dans le cadre de ce processus, des mesures par pixel ont été utilisées pour quantifier la composante spatiale de la performance du modèle dans une fonction objectif multivariable. Pour autant que l’on sache, c’est la première fois que des cartes de neige non agrégées dérivées d’images Landsat 8 ont été utilisées pour calibrer un modèle de neige distribué. La dynamique de la neige a finalement été reproduite de manière satisfaisante, la disparité restant étant probablement en grande partie attribuable aux données de forçage météorologique. Les incertitudes prédictives et la valeur des différents types d’observation ont également été quantifiées, et des estimations de la fonte du névé, de la fonte de glace et de l’évapotranspiration potentielle (ETp) ont été générées.
    Le modèle surface-souterrain intégré a été développé avec le code HydroGeoSphere (HGS) et partiellement calibré, toujours à l’aide de PEST, par rapport au débit du cours d’eau et aux mesures du niveau des eaux souterraines. Le débit a été reproduit à la station principale sur une période d’évaluation indépendante de 11 mois (novembre 2017 – septembre 2018 inclus) avec un coefficient d’efficacité Nash-Sutcliffe de 0,75. Le principal signal saisonnier des niveaux d’eau souterraine observés a été également généralement reproduit, bien que capturer les différences observées entre les sites soit restée hors d’atteinte, probablement en raison de la variabilité des propriétés hydrauliques à l’échelle locale. Des données spatio-temporelles simulées de plusieurs autres variables hydrologiques importantes ont également été visualisées pour illustrer la cohérence du modèle et les capacités d’une telle approche.
    Enfin, avec le but d’évaluer l’ampleur potentielle du changement hydrologique futur dans ces régions et d’en dégager les facteurs dominants, la chaîne de modèles (WaSiM et HGS) a été forcée avec des scénarios changement de climat, de végétation et de pergélisol projetés en cas de réchauffement « modéré » d’ici 2075 environ ; il s’agit de la première évaluation de l’impact du changement climatique hydrologique entreprise à l’aide d’un modèle surface-souterrain intégré dans les Alpes. Dans le bassin hydrographique du Vallon de Nant, par exemple, une augmentation de l’ETp annuelle d’environ 10 % et une diminution du pic moyen de stockage d’eau sous forme de neige en hiver d’environ 34 % (par rapport à la base de référence simulée) sont prévues dans un tel climat. Les changements dans les apports d’eau liquide dans le système (pluie plus la fonte des neiges) annuels sont cependant prévus d’être faibles, car la réduction des précipitations estivales est compensée par l’augmentation des précipitations hivernales.
    Pour l’ensemble du domaine, les changements combinés du climat, de la couverture terrestre et du pergélisol devraient entrainer une augmentation, sur une période de simulation de trois ans, de l’évapotranspiration réelle (ETa) d’environ 44 %, et une réduction du débit des cours d’eau d’environ 10 %. Les changements climatiques directs se sont avérés dominants, l’effet modulateur des changements de la couverture terrestre et du pergélisol étant beaucoup plus limité en comparaison. En conclusion, le fait d’entreprendre des travaux similaires plus régulièrement pourrait accroître la confiance dans les prévisions de l’évolution future de l’hydrologie alpine. Cela dit, étant donné l’ampleur des efforts nécessaires pour développer et les difficultés associées à la calibration de tels modèles, les applications ne sont actuellement recommandées que dans les bassins versants exceptionnellement importants ou écologiquement sensibles, ou encore là où une grande partie des données requises existent déjà.
    Abstract The rugged topographic forms and complex geologies that are characteristic of Alpine terrain typically exert a strong influence on catchment-scale hydrological processes. Glaciers, the seasonal snowpack, permafrost, and forests are other integral parts of Alpine environmental systems, and all are currently responding in one way or another to ongoing climatic change. Since a web of process interactions and feedback mechanisms link all system components together, any fairly direct hydrological changes arising from changing snow and ice could be modulated by the response of the broader integrated systems. Yet despite this complex reality, legacy conceptual or “box-type” hydrological models – which employ highly simplified representations of groundwater and other physical processes, and which moreover usually neglect contemporaneous changes in other system components – continue to underpin most predictions of future water availability in the European Alps. The reliability of some of the resultant predictions may there-fore be questionable. More sophisticated physically-based codes are available, but also employ simple subsurface representations. At the same time, numerous detailed field investigations have been carried out in alpine catchments, but are rarely extended to numerical modelling exercises.
    In this context, the present thesis sought to evaluate the utility of one of the most advanced fully-integrated surface-subsurface flow codes for simulating hydrological dynamics in steep, snow-dominated, and geologically complex Alpine headwaters – under both present and plausible future climate, forest, and permafrost conditions. Surface flows are particularly relevant in such terrain in terms of ecology, flood hazard, and sediment transport, whilst groundwater flow patterns can be strongly influenced by inherently complex three-dimensional (3D) subsurface structures. Furthermore, bi-directional exchanges between these domains can occur frequently, inducing streamflow ephemerality under certain circumstances. In having the capability to simulate all these processes in a coherent, physically-based, and transient fashion, integrated codes theoretically hold great potential for Alpine applications. However, their use in mountainous contexts to date has been predominantly limited to low permeability crystalline catchments of the North American Cordillera.
    The development of a model chain incorporating snowpack evolution and integrated surface flow, variably-saturated subsurface flow, and evapotranspiration dynamics was therefore embarked upon. The spatial domain (total area ∼37 km2) was comprised of two adjacent protected headwaters – the Vallon de Nant and Vallon de La Vare – which are located within the renowned Nappe de Morcles (western Swiss Alps). At the outset, very little of the extensive data re-quired to inform such a “data hungry” model was available. To partially remedy this situation, four shallow groundwater monitoring wells were drilled in late 2016 and instrumented in spring 2017. The resultant groundwater level observations complement meteorological and stream dis-charge measurements provided by collaborating research groups. A geophysics field campaign was also undertaken with a view to establishing the geometry of the principal alluvial fan aquifer in the study area. The geometries of several other less accessible unconsolidated sedimentary formations thought to host aquifers were estimated by means of a simple geomorphometrical procedure.
    With the aid of the GeoModeller software, an accurate, high-resolution, detailed, and spatially extensive 3D model of the bedrock geology was developed. In light of the topographical and geological complexity of the study region, this task was far from straightforward, but was nevertheless ultimately achievable. This contribution thus demonstrates that 3D geological models with appropriate characteristics for hydrogeological applications can be developed in even the most complex settings, and that the lack of such data (at least) should not form an impediment to progressing beyond simple conceptual hydrological models. Alongside the aforementioned unconsolidated aquifer geometries and (very limited) soil data, the geological model informed the subsurface structure of the integrated flow model.
    Thereafter, to overcome the lack of any pre-existing third-party gridded meteorological products with the requisite spatio-temporal resolution that such terrain demands, and to determine spatio-temporal patterns of liquid water inputs to the system as accurately as possible, a novel, code-independent, and high resolution (hourly, 25 m) snow simulation, optimisation, and uncertainty framework was proposed. The approach is specifically tailored to the steepness of the study area and the somewhat limited availability of in situ meteorological and snow data; two factors which often complicate modelling in mountainous terrain.
    Being energy balance-based and additionally accounting for gravitational redistribution, the snow modelling approach extends well beyond that taken in many hydrological models – including otherwise advanced fully-integrated ones – which still mostly rely on index-based snowmelt modelling approaches whose ability to realistically reproduce snow dynamics in com-plex Alpine terrain is questionable. More specifically, by linking an hybrid physical-statistical energy balance-based snow simulator, implemented in the code WaSiM, with the automatic parameter estimation and uncertainty estimation software PEST, two complementary types of snow observations – namely snow extent maps and snow water equivalent time-series – contributed to the estimation of several important but uncertain parameters.
    As part of this process, per-pixel metrics were used to quantify the spatial component of model performance within a multi-variate objective function. As far as is known, this represents the first time unaggregated snow maps derived from Landsat 8 images have been used to calibrate a distributed snow model. Snow dynamics were ultimately reproduced satisfactory, with the residual mismatch probably largely attributable to deficiencies in the meteorological forcing data. Predictive uncertainties and the worth of different observation types were also quantified, and commensurate estimates of firn melt, ice melt, and potential evapotranspiration (ETp) generated.
    The fully-integrated surface-subsurface model was developed using the code HydroGeoSphere (HGS) and partially calibrated, again using PEST, against the streamflow and groundwater level measurements made a several internal locations. Streamflow was reproduced at the main gauging station over an independent 11-month evaluation period (November 2017 – September 2018 inclusive) with a Nash-Sutcliffe Efficiency coefficient of 0.75. The main seasonal signal of the observed groundwater levels could also be broadly replicated, although capturing the observed differences between sites remained elusive, probably due to local scale variability in hydraulic properties. Simulated spatio-temporal patterns of several other important hydrological variables were also visualised to illustrate the model’s coherence and the capabilities of such an approach.
    Finally, in an attempt to assess the potential magnitude of future hydrological change in such regions and unravel its dominant drivers, the model chain (i.e. WaSiM and HGS) was forced with climate, vegetation, and permafrost scenarios that could be expected under “moderate” warming by approximately the year 2075; this represents the first hydrological climate change impact assessment undertaken using a fully-integrated surface-subsurface model anywhere in the Alps. In the Vallon de Nant catchment, for example, an increase in annual ETp of approximately 10%and a decline in mean peak winter snow water storage of around 34% (relative to the simulated baseline) are predicted under such a climate. Changes in total annual “snowcover outflow” (i.e. rain plus snowmelt) are projected to be small, however, as reduced summer precipitation is offset by winter increases.
    For the entire domain, the combined climate, land cover, and permafrost changes propagate through to an anticipated increase, summed over a three-year simulation period, in actual evapotranspiration (ETa) of around 44%, and reduction in streamflow of around 10%. Direct climatic changes were found to dominate, with the modulating effect of changes in land cover and permafrost being much more limited by comparison. In conclusion, undertaking similar work more routinely could increase confidence in predictions of the future evolution of alpine hydrology. That said, given the scale of the efforts required to develop and the difficulties associated with calibrating such models, applications are presently only recommendable in exceptionally important or ecologically sensitive catchments, or else where much of the requisite data already exists.